Genève

À Genève, les conflits de mobilité sont loin d'être nouveaux

19.04.2024 10h14 Céline Argento

mobilité

La mobilité à Genève est un sujet de profonds débats et désaccords à Genève. Mais voilà: c’est loin d’être nouveau. Au fil du 20e siècle, le développement des transports publics s’est fait en même temps que celui de la voiture et du vélo. Un livre signé par un écrivain et un historien retrace ces avancées, sous un angle politique et social.

Nous sommes autour de 1880. Les premiers transports publics sont alors à cheval et à vapeur, comme le précise l’écrivain Moreno Berva: «La place Neuve était le terminus de la première ligne de tramway de 1862, qui portait les gens d’ici à Carouge: ce sont les débuts de la 12. Et l’arrêt de tram est toujours au même endroit aujourd’hui !»

En 1900, changement de cap. La Compagnie genevoise des tramways électriques, ancêtre des TPG, rachète les diverses structures privées pour les unifier avec un but, tout électrifier. La compagnie s’installe à la Jonction. Le lieu est jusqu’ici dédié au maraîchage: «On retrouve encore des rues qui portent cet héritage: rue des plantaporêts, rue David Dufour qui était lui-même maraîcher. En 1900 on remplace le maraichage par des quartiers populaires et une activité industrielle qui va de pair avec cela» explique l’historien Ludovic Maugué. 

Sur les rails de la modernité

Un homme, en 1928, va se saisir de la dimension sociale de son rôle: le nouveau directeur de la compagnie Eric Choisy. Jusqu’à 1948, l’AVS n’existe pas. Il veut aider ses collaborateurs: «Il va rationaliser les assurances sociales et maladies, il va contribuer à fixer les salaires, à diminuer la durée du temps de travail. En fait, toute une batterie de mesures qui vont mettre sa société sur les rails de la modernité». 

Le statut des femmes évolue aussi au fil du temps. En 1960, les premières receveuses font leur apparition, en charge des billets et recettes. Certains crient au scandale: des femmes sans formation vont gagner un salaire décent. Les premières conductrices de trolleybus arrivent en 1968. 

Essor de l’automobile

Au fil des ans, le réseau de tramway s’est considérablement développé. En 1912, il est le plus important de Suisse, avec plus de 100 km de lignes. Mais déjà en 1899, les premières voitures apparaissent et avec elles, les confits de mobilité. la police attribue pour chaque véhicule un klaxon différent. La cloche pour les trams, la trompe pour les automobiles, le grelot pour les cyclistes. Les confits de mobilité sont déjà présents. En 1935, le tout premier feu de circulation est créé au croisement du boulevard Georges Favon et de la rue du stand. On vient de tout le canton pour le voir. 

Le 20e siècle, est celui de l’essor de l’automobile. En 1905, le premier salon de l’auto a lieu. Une passerelle est installée entre le bâtiment électoral et la plaine de Plainpalais, avec un tapis roulant: «Elle permettait aux visiteurs dont les stands  étaient installés à l’intérieur du bâtiment électoral d’aller visiter l’extension du salon qui était sur la plaine. Genève était l’une des villes les plus motorisées au monde et le siège d’importants lobbys, pneumatiques, thermiques, qui ont poussé le développement de la voiture au détriment du tramway. 

À la différence des grandes villes comme Bâle, Berne ou Zurich, les transports genevois sont alors privés. Le président de la compagnie de tramway est aussi… l’un des fondateurs du TCS: «Au sein même de la CGTE il y a les plus fervents partisans du développement de l’automobile» rappelle Ludovic Maugué. 

Retour du tramway

Les lignes de tramways sont peu à peu démantelées au 20e, avant de retrouver leur place des décennies plus tard dans les années 90, par la construction du Bachet notamment. Avec les récents développements du transport public, il a fallu construire un nouvel entrepôt, à Meyrin. Clin d’oeil à l’histoire, le bâtiment historique des TPG a été rénové, et réinvesti par des collaborateurs il y a quelques mois. 

Références : «La mobilité au coeur du patrimoine», éditions Livreo Alphil.