Genève

En pleine crise, les cinémas se réinventent

18.01.2021 18h53 Rédaction

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Fermés par la crise, les cinémas tirent la langue. Mais alors que de grandes productions décident de se passer des grands écrans pour sortir le blockbuster en ligne, via streaming, le grand écran se réinvente. Plutôt que la fin des salles, les spécialistes du 7e art y voient une révolution.

Comme tous les cinémas, celui des Scala est fermé à cause de la crise. «La situation est compliquée. On s’endette, et on va sans doute devoir continuer à s’endetter. Il va falloir réussir à éponger cela dans les années qui viennent», regrette Laurent Dutoit, directeur des Scala.

Le streaming pour concurrence? 

En presque un an, les cinémas ont pu ouvrir quelques semaines cet été, avant de devoir refermer brusquement leur porte. Face à cette situation, certaines productions ont décidé de se passer des grands écrans. C’est le cas de Disney, qui décide de sortir son blockbusters Mulan uniquement en streaming sur sa propre plateforme. Mais pour Laurent Dutoit, la consommation en ligne n’est pas une concurrence viable sur le long terme. «Il n’y a pas beaucoup de films qui sont passés sur les plateformes. Il y en a quelques-uns qui ont fait ce choix, mais c’était surtout un choix politique des studios pour faire la promotion de leur plateforme.»

Mais certains spécialistes du milieu cinématographique sont plus sceptiques. Pour Thierry Spicher, reponsable d’une de la boîte de distribution Outside the Box, il y a indéniablement un changement dans le mode de consommer les films, mais aussi dans le modèle économique du cinéma. «Les plateformes ne sont pas seulement des lieux de diffusion, ce sont aussi des lieux de production. Elles investissent. De plus, la publicité pour faire venir les gens en salle est beaucoup plus chère que la publicité sur internet pour faire venir les gens sur votre plateforme.»

Une crise sur la crise 

Selon lui, la crise mise en lumière par le Covid serait donc bien plus profonde. «On peut dire que c’est aussi une opportunité cette crise, car elle force les acteurs du milieu à prendre conscience d’un certain nombre de problèmes et de l’évolution de ce milieu. Avec une baisse de fréquentation, une suroffre de films et des films exposés de moins en moins longtemps. La crise liée à la fermeture des salles, elle arrive sur une crise qui est préexistante dans le cinéma.»

Les cinémas sont donc confrontés à des changements profonds, mais ses principaux acteurs restent optimistes. Plutôt qu’une mort des salles, il s’agit de les réinventer. «Je pense que tous les exploitants vont s’adapter d’une manière ou d’une autre, explique Nicolas Cumin, directeur de Pathé Genève. Aujourd’hui les magasins avec les sites internet et Amazone ne sont pas morts, peut-être grâce à un meilleur service et c’est ce que nous allons faire aussi.»

Les blockbusters retardés

Mais reste que les salles Pathé dépendent aujourd’hui encore beaucoup des blockbusters. Et actuellement, tous sont soit en ligne, soit retardé… à l’image du dernier James Bond qui n’a, pour le moment, pas encore céder au streaming. Car si mourir peut attendre, la sortie en salle aussi. «Il aurait dû sortir il y a un an. Mais tout le calendrier est chamboulé »  

«S’il y a une chose dont je suis à peu près certain, c’est que ça ne sera plus comme avant. Ajoute Thierry Spicher. Ce sera mieux, ce sera pire, mais ce sera différent. En quoi ce sera différent ? C’est à nous de construire l’avenir. En se demandant où nous voulons être dans 5 ans. Dans 5 ans, à quoi doit servir une salle, qu’est-ce qu’on aimerait comme salle ?»

En 2019, année sans crise, les cinémas suisses enregistraient 12 millions d’entrée. C’est 8 millions de moins que dans les années 80.

Lea Job 

Pour discuter de la crise du cinéma, nous recevions en plateau Maria Watzlavic, co-directrice du festival Black Movie, qui commence ce vendredi