Genève

Qui va payer les tests de dépistage du coronavirus?

22.05.2020 16h32 Rédaction

Test de dépistage du coronavirus

Vendredi midi, seuls treize nouveaux cas de coronavirus avaient été diagnostiqués en Suisse les vingt-quatre dernières heures. C'est peu, très peu, en comparaison d'il y a quelques semaines. Si aujourd'hui la première vague est dernière nous, tout l'enjeu et d’éviter une recrudescence de la maladie. Cela passera par des dépistages systématiques, et il faudra beaucoup tester, préviennent les médecins.

Personnes symptomatiques

Un dépistage dont le prix varie entre cent et quelques centaines de francs. Pour son financement, la Confédération prévoit plusieurs cas de figures. Prenons d’abord les personnes symptomatiques. Si vous êtes vulnérable ou hospitalisé, l’assurance maladie obligatoire prend en charge financièrement le test. La franchise et quote-part reste due.

Si vous n'êtes pas à risque, votre canton passe à la caisse. Sauf si vous travaillez dans le domaine médical ou en EMS, ou êtes membre de l’armée, du service civil ou de la protection civil. Dans ces cas-là, ce sont respectivement l’assurance-accidents et l’assurance militaire qui payent.

Sans symptôme

Pour les personnes qui n’ont aucun symptôme, tout dépend de qui fait la demande de test. Si c’est le médecin cantonal, le canton doit payer. Si un employé est exposé à un risque spécifique sur son lieu de travail, l’employeur doit faire la demande de test, et passer à la caisse. Enfin, si c’est le patient lui-même, les coûts sont intégralement à sa charge.

Cantons mécontents

Reste que cette réglementation ne convainc pas tout le monde. Les cantons dénoncent par exemple une inégalité de traitement, car certains patients devront passer à la caisse pour payer la franchise. Avec la crainte que certains renoncent à se faire dépister en raison des coûts.

Valentin Emery

Dans le canton de Genève, il faudra attendre quelques mois pour avoir une vision claire des chiffres mais ceux-ci pourraient atteindre les 100 millions de francs, selon Mauro Poggia. Une décision qui agace un peu le conseiller d’état en charge de la santé. «Vous savez, c’est une habitude au niveau fédéral. Chaque fois qu’on ne veut pas payer, on dit que c’est à la charge des cantons.» Pour lui, chaque acteur doit prendre ses responsabilités. 

Mauro Poggia ne s’oppose pas à une campagne de dépistage ni même à ce que le canton en assure une partie des frais. Il s’indigne toutefois que le dépistage soit facturé aux cantons si les symptômes sont légers alors qu’en cas de symptômes lourds, celui-ci sera remboursé par la LAMAl avec franchises et participations. «Quand on veut lutter contre une épidémie, il faut qu’on soit efficace. Il faut absolument éviter qu’il y ait des éléments étrangers qui viennent polluer l’esprit du patient quand il décide s’il va aller ou non se faire dépister.» Pour le conseiller d’état, les citoyens sont assez passés à la caisse et les assurances doivent aujourd’hui utiliser les réserves spécialement conçues pour ce genre de situations. 

Ce n’est pas Baptiste Hurni qui contredira Mauro Poggia. Conseiller national neuchâtelois PS et également président de la Fédération Suisse des Patients, il reçoit des courriers de personnes admettant avoir des symptômes du coronavirus mais ne pas être en mesure de payer le dépistage dont le prix peut s’élever jusqu’à 300 francs. Selon le conseiller national, les personnes qui choisissent de souscrire une assurance avec une franchise très haute sont souvent dans le besoin et évitent les consultations médicales pour ne pas accumuler les frais. «C’est aberrant qu’aujourd’hui, avec tous les efforts que nous avons fait pour endiguer la pandémie, nous prenions le risque de la relancer pour quelques millions de francs.» Baptiste Hurni souhaiterait une solution unifiée entre la Confédération, les cantons et les assurances, à l’image de l’Allemagne. Comme l'a proposé le Professeur Pittet, ils souhaiterait également que les franchises soient supprimées.

Une solution inimaginable et injuste pour le conseiller national valaisan PLR Philippe Nantermod. Selon lui, ce n’est pas à la collectivité de prendre en charge les choix individuels de ceux qui ont souhaité souscrire une assurance avec une haute franchise. «De plus, les personnes qui ne peuvent payer leur franchise sont déjà aidées par les cantons», ajoute-t-il. Une mesure d’autant plus injuste, pour Philippe Nantermod, qu’elle insinue que des exceptions peuvent être faites pour le coronavirus mais pas pour les autres problèmes de santé. «Ce serait une inégalité de traitement qui s’appuie sur l’idée que les citoyens sont irresponsables!»

 

 

Léa Frischknecht