Genève

Tariq Ramadan clame son innocence

28.04.2021 18h22 Rédaction

TRariq TRariq

EXCLUSIF - Mis en prévention pour viol et contraintes sexuelles sur une plaignante genevoise, Tariq Ramadan accorde un entretien exclusif à Jérémy Seydoux, alors que ses avocats, Mes Yaël Hayat et Guerric Canonica déposent une demande de classement de la procédure dirigée contre lui.

Selon eux, à la lumière des éléments en possession des enquêteurs, l’islamologue est innocent et fait l’objet d’une cabale mensongère. Tariq Ramadan conteste tous les faits qui lui sont reprochés et nie toute relation sexuelle avec la plaignante. Il est ce soir l’invité de notre journal.

En retrait des médias depuis l’éclatement du volet genevois de l’affaire et des multiples plaintes dirigées contre lui en France, Tariq Ramadan livre pour la première fois son récit des faits, tels que développés dans la demande de classement: « Aujourd’hui, nous n’en sommes plus à l’idée que ce serait parole contre parole. Aujourd’hui, c’est la parole d’une plaignante contre les faits. »

Les avocats de Tariq Radaman réagissent

« Le moment est grave, assez inédit. C’est la première fois que notre client s’exprime, explique Maître Yaël Hayat. J’observe la sérénité avec laquelle il parle. On voit qu’il a besoin de poser et de nommer les choses. Cette demande qui vient d’être déposée, c’est un travail rigoureux. »

De son côté, Maître Canonica précise « qu’il n’y a pas un élément qui ne trouve pas un fondement rigoureux dans la procédure actuelle ».

Les deux avocats veulent désormais que le procureur en charge « tire les conclusions ». De notre côté, nous avons joint l’avocat de la plaignante, il pourra dès que possible répondre, sur notre plateau.

L’affaire Ramadan : rappel des faits

2017 - L’affaire éclate suite à l’affaire Weinstein, en plein mouvement #MeToo, à l’automne 2017. Deux plaintes sont déposées en France contre Tariq Ramadan pour viol, agressions sexuelles, violences volontaires, harcèlement et intimidation.

À Genève, plusieurs de ses anciennes élèves – dont la plus jeune avait 14 ans à l’époque – témoignent dans la presse avoir été abusées par Tariq Ramadan, enseignant notamment au Collège de Saussure dans les années 1980-90. En raison de la prescription, ces accusations ne seront pas poursuivies.

Le Conseil d’Etat genevois finit par diligenter une enquête administrative sur les responsabilités du Département de l’Instruction publique (DIP) dans la connaissance et la gestion de ces cas (et d’autres) au sein de l’école au cours des trente dernières années.

2018 - Tariq Ramadan est mis en examen par la justice française pour viol et viol sur personne vulnérable. Il est placé en détention provisoire le 2 février. L’islamologue sera libéré neuf mois plus tard mais reste encore à ce jour soumis à un contrôle judiciaire strict, avec interdiction de quitter le territoire français.

Le 13 avril, une troisième plainte est déposée, à Genève, par une femme surnommée Brigitte, pour contrainte, séquestration, contrainte sexuelle et viol avec cruauté la nuit du 28 octobre 2008 dans un hôtel à Genève.

Une plainte suivra en France.

Tariq Ramadan rejette les accusations dont il fait l'objet mais finit par reconnaître des relations extraconjugales.

Le 7 septembre, le Ministère public genevois ouvre une instruction pénale pour viol et contrainte sexuelle à l'encontre de l’islamologue dans le cas de la plaignante suisse.

En novembre, le Conseil d’Etat genevois rend les conclusions de l’enquête administrative et conclut que le département de l’Instruction publique (DIP) a parfois « failli » dans la protection de ses élèves sans se prononcer sur les faits eux-mêmes.

2019 - Tariq Ramadan riposte en déposant plainte à son tour pour dénonciation calomnieuse et dénonciation d’une infraction imaginaire contre trois des plaignantes françaises. Une cinquième plainte est déposée en France.

2020 - Une sixième plainte est déposée en France.

À ce jour, Tariq Ramadan est cinq fois mis en examen en France et mis en prévention en Suisse. Le dossier d’instruction français devrait être bouclé d’ici à l’automne avec un probable renvoi en Cour d’Assises où l’islamologue risque jusqu’à vingt ans de prison.

À Genève, l’instruction se poursuit dans l’attente de la décision du Ministère public genevois quant à un éventuel renvoi en procès.

Jeremy Seydoux - Laetitia Guinand