Bilan des sortants: Serge Dal Busco, un «ayatollah» de gauche ?
Nous sommes à trois semaines du premier tour de l’élection au Conseil d’Etat. Parmi les candidats, quatre sortants. Mais trois de nos ministres ne se représentent pas. C'est le cas notamment du conseiller d’Etat en charge des Infrastructures, Serge Dal Busco. Il revient sur cinq ans passés aux Infrastructures.
Juin 2021: l’image est forte. Le président du conseil d’Etat genevois Serge Dal Busco accueille Joe Biden avant la poignée de main historique à la villa Lagrange. Mais à l’heure du bilan, l’image de Serge Dal Busco est surtout liée à la mobilité. Après cinq ans aux Finances, il reprend en 2018 les Infrastructures: « Ce qui m'a marqué dans ce département, c'est que les choses vont lentement, trop lentement. Et je suis un impatient de nature, pas seulement à titre personnel, mais aussi parce que les gens attendent des résultats» nous précise-t'il.
8 km de pistes cyclables
Un coup d’accélérateur arrive pourtant en mai 2020. Pour inciter à se déplacer à vélo avec la reprise des activités après le confinement, en une nuit, 8 km de pistes cyclables sont dessinées. Serge Dal Busco confirme son choix d'alors: «C'était absolument nécessaire car les gens ne voulaient plus prendre les transports publics. Si tout le monde avait pris sa voiture, ç'aurait été le chaos». Le lendemain de la création de ces pistes, de longues files de voitures s'étendent. La grogne enfle mais le conseiller d'Etat est droit dans ses bottes: «On a dit de moi que c'était un comportement de dictateur mais la loi l'autorisait.»
Serge Dal Busco choisit aussi de ne plus autoriser le passage des scooters sur les voies de bus, mesure mise en place en test par son prédécesseur. Il propose également de supprimer 4'000 places de stationnement. Le peuple l’accepte en septembre 2020. Autre combat, l’extension des zones à 30 km/h pour limiter le bruit routier. Une mesure actuellement contestée par plusieurs milieux de défense des automobilistes.
Le conseiller d’Etat est accusé de mener une politique de gauche. Il rétorque: «Lorsque j'étais aux Finances, on disait de moi que j'étais un suppôt du grand capital. Maintenant j'entends des critiques, comme si j'étais un ayatollah de gauche. Mais je suis toujours le même». Il est surnommé notamment Dal Bouchon, par Luc Barthassat. Le conseiller d'Etat ne manque pas aujourd’hui de tacler son prédecesseur: «Monsieur Barthassat a sans doute manqué une occasion de se taire».
Guerre des transports
Pour Serge Dal Busco, la route n’est pas extensible. Il fallait faire de la place à ceux qui en ont le plus besoin, soit les personnes à mobilité réduite ou les entreprises. Voiture contre mobilité douce, une guerre des transports délétère pour le chef des Infrastructures: «Certains cantons ont fait la paix des braves, et ont ainsi récupéré des milliards de la Confédération. À Genève, la mobilité est encore trop une affaire partisane».
Serge Dal Busco était en charge d’un dossier en forme de serpent de mer: la traversée du lac. En cinq ans, le dossier a peu bougé. Jusqu’à cette fin février, où Berne a pour la première fois mentionné le bien fondé de cette infrastructure: «Tout ce qui avait été dit avant, les gesticulations, les promesses pour 2025, c'était du pipeau. Il fallait faire les choses dans l'ordre. Nous l'avons fait», affirme le conseiller d'Etat.
Côté transports public un moment est déterminant, l’inauguration du Léman Express. Serge Dal Busco prononce alors son discours en décembre 2019, usant de ces termes: «Genève et sa région entrent enfin dans le 21e siècle de la mobilité».
1 milliard pour les bâtiments
Le conseiller d’État mène aussi la politique de l’Office des bâtiments. En 2022, le gouvernement dépose un projet de loi d’un milliard pour la rénovation énergétique des bâtiments: «Jamais nous n'avons demandé un si grand montant au Grand Conseil. Il fallait que ce chiffre soit symbolique».
En cours de mandat, il se voit ajouter la responsabilité de l’aéroport. Le peuple vote pour un pilotage plus démocratique de l’institution en 2020. Un dossier plus personnel aura émaillé son mandat, celui de la bisbille avec la présidente de l’aéroport Corinne Moinat. En mars 2022, cette dernière est écartée par le conseil d’Etat, et donc Serge Dal Busco. Cette dernière parlera à notre micro, évoquant une rupture de confiance suite à des critiques.
«Nul n'est infaillible»
Autre dossier sensible, cette fois lié à l’affaire Maudet. Serge Dal Busco est accusé d’avoir reçu 10'000 francs dans l’entre-deux tours des élections de 2018 par le groupe Manotel. Le conseiller d’Etat assure en 2019 qu’il a rendu la somme: «Nul n'est infaillible. Il aurait sans doute fallu plus réfléchir.»
Serge Dal Busco, deux mandats, pas plus. Pour se reposer, mais aussi faire place à la relève dit-il, dans l’esprit de ce qu’il a fait comme entrepreneur. Ce printemps 2022 se révèle être bien particulier pour lui: «C'est la première fois où je suis actif dans un mandat mais que je ne participe pas à une campagne. C'est étrange mais pas désagréable».