Fini l'export de déchets pour les recycleurs genevois
Les entreprises de recyclage genevoises ne pourront plus exporter leurs déchets dans d'autres cantons ou à l'étranger. Les résidus de tri devront aller obligatoirement aux Cheneviers. Le tout sera inscrit dans la nouvelle loi déchets à venir. Un accord a été trouvé à l’issue de longs mois de discussions entre les recycleurs, SIG et l’Etat.
Dans les entreprises de recyclage, comme les deux grands Serbeco ou Helvetia, la majorité des déchets peuvent être traités. Mais reste un résidu de tri, à incinérer, soit environ 30% de la matière initiale. Jusqu’ici, aucune loi n’obligeait formellement ces recycleurs à incinérer les résidus à Genève. D’où la fuite vers d’autres cantons, à laquelle l’Etat veut mettre un terme. « Lorsque certains exportent leurs déchets, les Cheneviers doivent en importer pour faire tourner les fours et produire de l’énergie. Je souhaite que l’économie circulaire s’applique aussi pour les déchets» explique le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.
Prix attractifs
Entre 2016 et 2017, une baisse de 7’000 tonnes de ces résidus a été observée aux Cheneviers. Ce serait environ 20’000 tonnes actuellement qui partent vers l’extérieur selon le président des recycleurs Bernard Girod. La raison? Le prix. L’incinération à Genève est plus chère qu’ailleurs en Suisse: 160 chf dans notre canton, contre 110 chf à certains endroits. Les recycleurs sont donc tentés de gagner un peu, comme l’explique Bernard Girod: «Il y a 25 usines d’incinération en Suisse. Elles font des appels pour attirer les clients avec des prix attractifs. C’est tentant, pour les recycleurs.» Helvetia avoue sans autre s’être tourné vers d’autres cantons, après un refus de tarif préférentiel de la part de SIG.
Stopper la concurrence déloyale
Une pratique qui devrait prendre fin avec la nouvelle loi, fixant formellement les termes de l’accord trouvé entre l’Etat, SIG et les recycleurs. Ces derniers devront donc obligatoirement incinérer aux Cheneviers, ce qu’on appelle techniquement une zone d’apport. En échange, un tarif préférentiel d’incinération sera accordé aux bons élèves. Une nouvelle clause a aussi été pensée: l’obligation pour tous les producteurs de déchets de passer par les entreprises de recyclage. Soit une garantie de 10 à 20’000 tonnes de déchets à traiter en plus pour ces entreprises, et ainsi un chiffre d’affaires supplémentaire assuré. Pour le président des recycleurs, cet accord est aussi un moyen de stopper la concurrence déloyale entre eux: «On ne peut pas avoir les avantages mais s’engouffrer dans les failles ensuite. Nous repartons là sur le même niveau, tous ensemble». Des contrôles de la marchandise et des installations seront aussi réalisés.
Les quinze recycleurs ont accepté les grandes lignes de cet accord. Les règlements d’application doivent encore être finalisés. SIG n’a pas souhaité répondre pour l’heure à notre demande d’interview, attendant que l’accord soit entériné officiellement. La création d’une zone d’apport pour ce type de déchets est une première en Suisse. Le transport vers d’autres cantons sera donc répréhensible par la suite.
Céline Argento