Genève

Vers une interdiction des thérapies de conversion?

07.10.2021 17h48 Rédaction

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"À 19 ans, j'ai été envoyé aux USA pour faire une thérapie de délivrance des troubles sexuels, comme ils l'appelait, avec un thérapeute-pasteur-psychiatre chrétien, à raison de plusieurs heures par jour de prières et d'analyse de ce que j'aurais pu vivre durant mon enfance pour déclencher l'homosexualité..." le témoignage d'Adrian Stiefel n'est pas isolé. 

Si ces thérapies de conversions concernent l’orientation sexuelle et peuvent se dérouler au sein de communautés ou dans des structures spécialisées, elles peuvent aussi être portées sur l’identité de genre et avoir lieu au sein des foyers. Chloé a 35 ans et est en transition. Pourtant c’est depuis ses 8 ans qu’elle exprime son incongruence de genre.

A l’époque, elle est prise en charge par un psychologue en Belgique pour une thérapie de conversion comportementale. "Ce psychologue a en fait coaché mes parents. À la maison, ma mère m'a rasé la tête, mon père me forçait à suivre un entraînement militaire pour développer mes muscles, m'apprenait à me battre... On m'a imposé des visions de personnes trans représentées comme des monstres, comme le personnage de Buffalo Bill dans Le Silence des Agneaux", témoigne-t-elle. 

Des thérapies qui ne disent pas leur nom

Pour Chloé et Adrian, s’en suivent des années marquées par une rupture avec leur communauté ou leur famille. Un mal-être parfois profond avant de trouver l’écoute et l’accompagnement adapté. En Suisse, il est difficile d’identifier où et par qui sont tenues ces thérapies de conversions. L’association Torrent de Vie tenait encore il y a quelques années des antennes à Genève et Bussigny. Pour elle, le mot ne convient pas. Elle propose, explique-t-elle des accompagnements spirituels. Sur son site internet, plusieurs témoignages font état d’un retour à l’hétérosexualité, grâce à Dieu.

Aujourd’hui, Adrian préside l’Antenne LGBTI Genève au sein de l’Eglise protestante, au quotidien il apporte une aide et une écoute à celles et ceux ayant subi ce genre de méthode. "Nous servons aussi de passerelle entre la spiritualité et la sexualité; elle est souvent encore plus nécessaire lorsque l'on a subit une pratique dite de conversion", détaille-t-il. 

Chloé elle n’a pas pu bénéficier de ce type d’accompagnement tout de suite. Elle pense qu’avec une loi, elle n’aurait pas eu à subir tout cela. "Il y aurait eu plus d'armes à disposition, le moyen d'informer et d'alerter", dit-elle. 

Et la politique ?

A Genève, le Conseil d’État a l’intention de légiférer sur ces thérapies. Il serait alors le premier canton à interdire ces pratiques. Sarah Wyss souhaite aller plus loin, deux objets ont été déposés au conseil national." Outre le fait que ces prétendues thérapies sont dangereuses, des pays voisins ont eux déjà interdit ces pratiques. Le risque c'est que des structures étrangères s'implantent en Suisse pour faire ces thérapies, par manque d'un cadre légal!" explique l'élue socialiste. 

L’Allemagne et l’Autriche ont déjà réagi ces dernières années en interdisant ces mesures. En France, l’Assemblée Nationale votait une loi en ce sens mardi avant de passer la main au Sénat. Là-bas, les thérapies de conversions pourraient alors être punies de deux ans de prisons et 30'000 euros d’amende. 

 

Julie Zaugg