Culture

Didon et Enée au Grand Théâtre: «Un vrai beau spectacle»

20.02.2025 19h56 Rédaction

cherqui

L’opéra de Purcell, mis en scène par Franck Chartier et porté par la direction musicale d’Emmanuelle Haïm, s’installe au Grand Théâtre de Genève jusqu’au 26 février. Une version fascinante où la tragédie antique dialogue avec un quotidien en déroute.

«Didon et Enée», c’est une histoire de passion et de destinée, une fresque mythologique où Enée, contraint par les dieux, quitte Didon, reine de Carthage, la condamnant au désespoir et au suicide. Pourtant, dans la mise en scène de Franck Chartier, ce drame prend une toute autre dimension, explique le critique lyrique Guy Cherqui.

Plutôt que de juxtaposer l’œuvre de Purcell avec un autre opéra – comme c’est souvent le cas pour cette pièce courte (d'une durée de 50 minutes) –, la production fait le choix d’une réinterprétation visuelle et narrative. La compagnie de danse Peeping Tom s’approprie l’œuvre et la fusionne avec l’histoire de Didi, une bourgeoise enfermée dans un appartement cossu, figée dans une dépression où l’opéra devient son échappatoire.

«C’est un décor sur deux niveaux, entre un salon feutré et une réplique du Parlement anglais, qui se transforme peu à peu dans une démesure baroque», détaille le critique du Wanderersite.com. Ce glissement progressif du réalisme vers une vision «quasi-apocalyptique» plonge le spectateur dans une expérience immersive et troublante.

Une direction musicale d’exception

L’orchestre, Le Concert d’Astrée, est dirigé par Emmanuelle Haïm, figure incontournable de la musique baroque. «Les voix sont superbes, hiératiques, presque abstraites», souligne Guy Cherqui, ajoutant que le continuo, spécialement composé par Atsushi Sakai, enrichit la dimension chorégraphique du spectacle.

Si le spectacle séduit par sa puissance évocatrice, il fait aussi l’objet d’un avertissement concernant certaines scènes potentiellement choquantes. Une précaution jugée superflue par le critique: «La mythologie est pleine de sexe et de violence. Faudra-t-il bientôt afficher des avertissements dans tous les musées?» s'interroge le critique lyrique. Une chose est sûre, ce Didon et Enée ne laissera personne indifférent. Pour Guy Cherqui, il aura été «un spectacle qui revient et qui n'a rien perdu» de sa superbe.