Culture

La cérémonie des Quartz 2022 sera politique

25.03.2022 17h00

Des Quartz 2022 sous l'ombre de la guerre en Ukraine

Elie Grappe a reçu son prix vendredi soir à Zurich.

Photo: Keystone/WALTER BIERI

'Olga' d'Elie Grappe a remporté vendredi le Prix du meilleur film de fiction 2022 et 'Ostrov' celui du meilleur documentaire. La résonance entre ces films et la guerre en Ukraine aura pesé plus lourd que le nombre de nominations.

'Olga', le premier long métrage d'Elie Grappe, 28 ans et formé à l'ECAL, raconte l'histoire d'une jeune gymnaste ukrainienne qui se réfugie en Suisse au moment de la révolution pro-européenne de Maïdan en 2013 et 2014. Son film, coproduit par Point Prod et Jean-Marc Fröhle à Genève, rafle encore le prix du meilleur scénario et du meilleur son.

L'actrice d''Olga' en Suisse

Bloquée plusieurs jours dans un abri anti-aérien à Kharkiv, dans l'est de l'Ukraine, Anastasia Budiashkina, la jeune gymnaste de 20 ans qui incarne l'actrice principale dans 'Olga', a réussi à rejoindre la Pologne puis la Suisse. Elle était présente vendredi soir à Zurich où elle s'est exprimée brièvement de façon émue et pudique sur l'agression de la Russie contre son pays.

Avec les derniers événements, 'Olga' connaît une deuxième vie, car il est projeté en Angleterre, en Allemagne et aux Etats-Unis, où il est 'utilisé' pour lever des fonds en faveur de l'Ukraine. 'Il faut que nous restions éveillés, il faut continuer de participer aux dons et aux collectes', souligne Elie Grappe.

Dans le film, Olga est tiraillée entre son entraînement sportif à Macolin en vue des JO et les manifestations à Kiev où sa mère, journaliste, est impliquée. 'Cette tension entre gymnastique et images documentaires de la révolution, c'est aussi ce que vit mon personnage. Ces deux imageries-là n'ont rien à faire ensemble et en même temps n'arrêtent pas de s'entrechoquer.'

Pour le son, c'est à peu près le même champ lexical: le claquement de la barre de métal fait écho à ceux des coups pendant les manifestations, a-t-elle dit dans une interview à Keystone-ATS.

La métaphore d'Ostrov

Le documentaire 'Ostrov' de la Russe Svetlana Rodina et de Laurent Stoop s'intéresse lui à une île russe sur laquelle la vie était autrefois florissante avant de s'éteindre avec la chute de l'URSS. Aujourd'hui, les habitants n'ont plus guère que leur foi dans le 'sauveur' Vladimir Poutine.

'Avec la guerre en Ukraine, notre film est devenu une métaphore beaucoup plus profonde', a dit Svetlana Rodina sur les ondes de la RTS. 'La Russie en attaquant l'Ukraine s'isole, se transforme en île'.

'Pendant le tournage, nous avions des signes que la guerre était en préparation, mais sans vraiment le comprendre', a-t-elle poursuivi. 'Nos protagonistes regardaient les actualités tous les soirs à la télévision russe et nous avons filmé cela plusieurs fois. Et chaque jour, un, deux ou trois sujets mentionnaient les soi-disant nazis en Ukraine'.

Claudia Grob meilleure actrice

La pluie de nominations, attribuées à d'autres films, auront pesé moins lourd dans la balance. Dans 'La Mif' (6 nominations), le Genevois Frédéric Baillif a travaillé avec les résidentes et la directrice d'un vrai foyer. Et cette dernière Claudia Grob a remporté le Quartz de la meilleure actrice.

Pourtant elle ne se considère pas comme une comédienne: 'nous avons joué notre propre rôle, mais pas notre propre histoire', a-t-elle expliqué Keystone-ATS. Le meilleur second rôle féminin revient aussi à une actrice non professionnelle de 'La Mif', Anaïs Uldry - Audrey dans le film. 'La Mif' gagne encore le prix du meilleur montage.

Pablo Caprez récompensé

La meilleure interprétation masculine revient à Pablo Caprez (Gabriel) dans'Soul of a Beast' du réalisateur zurichois Lorenz Merz, nominé huit fois, un record. Ce film se voit encore décerner les prix de la meilleure musique et celui de la meilleure photographie.

Le Prix du Cinéma Suisse est décerné par l'Office fédéral de la culture (OFC), en collaboration avec l'association 'Quartz' Genève Zurich et la SSR. Outre les mentions à la guerre en Ukraine et à la prochaine votation sur la Lex Netflix en mai, la forte présence d'acteurs et d'actrices non professionnels aura été frappante lors de cette édition.

Quant au prix d'honneur, le conseiller fédéral Alain Berset l'a attribué au cinéaste Fredi M. Murer. Il est le réalisateur entre autres de 'L'Âme-soeur', 'Pleine lune' et 'Vitus'.

Les cinq fictions nominées pour cette édition 2022 et quatre documentaires sur cinq ont été co-produits par la SSR dans le cadre du pacte de l'audiovisuel. Trois des cinq fictions retenues ('Olga', 'La Mif' et 'Azor') ont été réalisées ou produites par des Romands comme deux documentaires sur cinq ('Les Guérisseurs' et 'Réveil sur Mars').

/ATS