Une archive précieuse raconte les maisons closes genevoises du XIXe siècle
L’historienne de l’art Mayte Garcia a repris un carnet racontant la vie d’une prostituée genevoise à la fin du XIXe siècle. Ce texte sera présenté vendredi soir dans le cadre du festival Histoire et Cité.
Le festival Histoire et Cité se déroule en ce moment en Suisse romande avec pour thème la rue. La prostitution y a donc sa place avec plusieurs conférences dont une vendredi soir à Uni Dufour. Mayte Garcia, historienne de l’art, parlera notamment de l’histoire d’une prostituée genevoise anonyme. Son témoignage a été retrouvé dans les archives de l’État de Genève. Un document exceptionnel et rarissime. «C’est très courageux de prendre la parole et de raconter ce qu’elle a vécu et je pense qu’aujourd’hui encore, cette honte est la même, explique Mayte Garcia. C’est un métier qui n’est pas protégé, qui est extrêmement difficile. Quand on est sorti de cette condition, oser prendre la parole c’est presque un exploit. C’est aussi une façon peut-être pour elle de revenir sur les évènements et de s’en débarrasser.»
«É», comme on l’appelle, a 18 ans. Elle est passée par Saint-Germain-en-Laye, par Nice, puis Genève. Elle parle de la maison close, des autres filles, mais jamais des actes. Elle dit «voir quelqu’un». Le récit est pourtant extrêmement émouvant. «Elle ne dit pas tout et pourtant elle ne cache rien. C’est un récit oral, je pense qu’elle maintient une forme de distance avec le lecteur.»
Le récit d'une véritable héroïne
Elle parle également de l’alcoolisme, mais aussi de cette maison fermée d’où elle ne sort jamais. La jeune femme ne manque cependant jamais d’humour ou d’empathie. «Elle va même s’échapper d’une des maisons dans laquelle elle est enfermée et elle va aider d’autres femmes. (…) Donc on a le récit d’une véritable héroïne». À ce moment-là, plusieurs cantons votent l’abolition de la prostitution ; Genève s’y oppose. Certains textes pour le maintien de la prostitution sont même ubuesques, mettant en avant l’égalité salariale.
Ce vendredi à 17h30 à Uni Dufour, avec Judith Aregger, Mayte Garcia reviendra sur ce témoignage et fera un parallèle avec la situation actuelle de ce métier, «touché par une même monumentale indifférence». L’historienne a publié également «Je n’étais plus aussi bête qu’au commencement», qui revient sur ce témoignage.