Accord « historique » pour protéger le fleuve Colorado
Les eaux du fleuve Colorado s'écoulent du réservoir du lac Mead entre les etats de l'Arizona (à droite) et du Nevada vers le barrage Hoover près de Boulder, Nevada.
Photo: KEYSTONE/EPA/ETIENNE LAURENTAu terme de longues et difficiles négociations, un accord 'historique' a été annoncé lundi entre sept Etats de l'Ouest américain concernant la protection du fleuve Colorado, dont le flux s'amenuise alors qu'il approvisionne en eau des dizaines de millions d'individus.
'Des représentants des sept Etats du bassin de la rivière Colorado ont donné leur accord à la soumission d'une proposition pour un système de protection du bassin inférieur', a déclaré le Département de l'Intérieur, en charge de la gestion des territoires aux Etats-Unis.
La proposition gagnante provient des trois Etats du bassin inférieur - Californie, Nevada et Arizona -, qui ont accepté de volontairement prendre des mesures permettant d'économiser 3,7 milliards de mètres cubes d'eau d'ici 2026. A cette date, de nouvelles réductions seront nécessaires.
Ces coupes seront réalisées par trois Etats: la Californie, le Nevada et l'Arizona, qui ont accepté de réduire leur consommation d'eau en provenance du fleuve de 13%.
Les trois quarts de ce volume seront compensés par le gouvernement fédéral, qui va payer 1,2 milliard de dollars pour que les agriculteurs et villes sur place consomment moins, selon les médias américains. Le quart du volume restant devra être réalisé sans compensation par les trois Etats.
L'accord 'marque une étape importante dans nos efforts pour protéger la stabilité du système du fleuve Colorado face au changement climatique et à des conditions de sécheresse historiques', a salué le président Joe Biden dans un communiqué.
Premier arrivé premier servi
Ce ton consensuel masque les crispations bien réelles autour du fleuve. Le partage des eaux du Colorado est réglé par un traité datant de 1922, historiquement biaisé: la surconsommation était inévitable, à cause de l'estimation erronée du débit moyen du fleuve retenue comme base.
Ce document a établi une loi de la rivière, basée sur la règle du 'premier arrivé, premier servi'. Les agriculteurs de Californie peuvent ainsi tirer plus d'eau du fleuve que l'Arizona et le Nevada réunis.
Les insuffisances de ce modèle sont apparues au grand jour l'an dernier. Après vingt ans de sécheresse dans la région, les deux plus grands réservoirs de l'Ouest américain, le lac Powell et le lac Mead, ont atteint des niveaux bas historiques.
La situation était tellement critique que les autorités ont craint que leur niveau d'eau passe en-dessous des turbines hydroélectriques des barrages attenants, ce qui aurait interrompu la production d'électricité et empêché le fleuve de couler en aval.
Enlisement
Face à cette crise, le gouvernement fédéral a d'abord demandé aux sept Etats riverains du cours d'eau - le Wyoming, l'Utah, le Colorado, le Nouveau-Mexique, la Californie, le Nevada et l'Arizona - de s'accorder pour réduire jusqu'à un quart de leur consommation.
Mais les négociations se sont enlisées et les échéances fixées pour trouver un compromis ont été plusieurs fois repoussées. Les pourparlers ont tourné à l'affrontement entre la Californie, la plus avantagée par le système, et les six autres Etats qui lui demandaient de faire la majorité des efforts.
L'administration Biden avait menacé d'imposer des restrictions d'envergure si les négociations restaient dans l'impasse.
L'accord trouvé lundi constitue donc un compromis permettant d'agir le plus vite possible.
Cette annonce est 'la preuve' de l''engagement' du gouvernement à 'trouver des solutions de consensus face au changement climatique et à une sécheresse persistante', a déclaré la ministre Deb Haaland.
Le fleuve Colorado approvisionne quelque 40 millions de personnes en eau du massif des Rocheuses au golfe de Californie, au Mexique, et irrigue des millions d'hectares de terres arables pour nourrir l'Amérique.
De nombreuses années de sécheresse, aggravées par le changement climatique et une augmentation des besoins en eau, ont réduit le fleuve, autrefois impétueux, à un niveau inquiétant.
A tel point que les réservoirs et barrages hydroélectriques le long de son cours sont aujourd'hui menacés.
/ATS