C8 écope d'une amende record de 3,5 millions d'euros
Les injures de l'animateur Cyril Hanouna adressées sur C8 au député LFI Louis Boyard en novembre ont valu 3,5 millions d'euros d'amende à la chaîne, une somme supérieure à celle infligée en 2017 par le régulateur.
L'animateur-vedette de la chaîne avait notamment traité le député, par ailleurs un de ses ex-chroniqueurs, d''abruti'. Il avait ajouté 'tocard' et 't'es une merde':
'L'Arcom a estimé que ces propos ont porté atteinte aux droits de l'invité, au respect de son honneur et de sa réputation' et que 'cette séquence traduisait une méconnaissance par l'éditeur de son obligation de maîtrise de son antenne', a déclaré le régulateur des médias dans un communiqué.
Les altercations et incidents lors des émissions de Cyril Hanouna ont déjà valu à sa chaîne de nombreux avertissements et sanctions, dont une amende record de 3 millions d'euros pour un canular jugé homophobe en mai 2017. Hasard du calendrier, la Cour européenne des droits de l'Homme a débouté jeudi C8 qui contestait cette sanction, au nom de la liberté d'expression.
L'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique a également indiqué jeudi avoir mis en demeure la chaîne de respecter ses obligations en matière d'honnêteté et d'indépendance de l'information.
Indépendance et censure
Elle a considéré que Louis Boyard 'avait été explicitement empêché d'exprimer en plateau un point de vue critique à l'égard d'un actionnaire du groupe Canal+, auquel appartient le service de télévision C8', ce qui n'avait pas permis de réaliser l'émission 'dans des conditions qui garantissent l'indépendance de l'information'.
'Le groupe Canal+ déplore la décision de l'Arcom (...) ne tenant en rien compte du comportement de (Louis Boyard) lors de l'émission du 10 novembre 2022. Le groupe Canal+ mettra en oeuvre les voies de recours possibles dans les plus brefs délais', a indiqué l'entreprise dans un communiqué jeudi soir.
'Le milliardaire Bolloré a voulu me censurer. On a Touché à Son Poste', a pour sa part réagi Louis Boyard sur Twitter.
Cette décision du régulateur, autorité indépendante du gouvernement, survient dans un contexte de tensions entre Canal+, filiale du groupe Vivendi piloté par le milliardaire conservateur Vincent Bolloré, et la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak.
Politique
La chaîne mène aussi un bras de fer avec la ministre de la culture. Jeudi matin, la ministre avait jugé 'inadmissible' l'appel à la privatisation de l'audiovisuel public de la vedette de C8, Cyril Hanouna. 'Privatisez-moi ça', avait lancé mi-janvier l'animateur de 'Touche pas à mon poste'. Une diatribe lancée en réponse à des déclarations de la ministre rappelant la possibilité pour l'Arcom de retirer à CNews et C8 la fréquence mise à leur disposition quand elles ne respectent pas leurs obligations.
La passe d'armes s'était poursuivie dans la presse, le patron de Canal+, Maxime Saada, rétorquant qu''un ministre ne devrait pas dire ça'.'Je suis dans mon rôle quand je rappelle le cadre existant', s'est défendue jeudi la ministre. 'Il y a des obligations à respecter. Il y a déjà eu une vingtaine d'interventions de l'Arcom, depuis 2019, pour C8 et CNews. Au bout de combien d'interventions l'Arcom pourra-t-elle dire à quel degré les obligations ne sont pas respectées ? C'est le rôle de l'Arcom', a-t-elle ajouté.
'Nous avons été profondément choqués par les propos tenus par Madame la ministre de la culture', a déclaré Canal+ dans un communiqué. Le groupe Vivendi, détenu par le milliardaire conservateur Vincent Bolloré, faisait référence aux paroles tenues par Rima Abdul Malak lors de la matinale de France Inter.
'Près de cinq minutes de son intervention ont été consacrées à la critique de notre groupe et à des invectives contre nos chaînes C8 et CNews', s'est offusqué Canal+. 'En laissant à nouveau entendre que' leurs licences 'ne mériteraient pas d'être renouvelées en 2025', la ministre 'prend parti, sort de sa réserve et ne respecte pas l'indépendance de notre régulateur sectoriel', l'Arcom, a estimé le groupe. Elle suscite en outre 'l'inquiétude de nos salariés en menaçant la pérennité de leur activité', poursuit-il.
/ATS