Deezer cherche à entrer en Bourse
Deezer avait déjà tenté d'entrer en Bourse en 2015, mais avait renoncé à son projet, jugeant les conditions de marché défavorables. (archives)
Photo: KEYSTONE/DPA/FABIAN SOMMERUne entrée en Bourse peut-elle aider la plateforme de streaming musical Deezer à conquérir de nouveaux marchés et à résister aux géants du numérique ? L'opération menée par des grands noms du capitalisme français sera scrutée par l'écosystème tech hexagonal.
Si elle se réalise comme prévu fin juillet, l'introduction serait la seconde en un peu plus d'un an d'une licorne française, terme désignant une jeune pousse technologique valorisée plus d'un milliard d'euros.
La pépite Believe, spécialisée dans l'accompagnement d'artistes et de labels indépendants, avait levé 300 millions d'euros lors de son introduction en juin 2021, une déception face au montant escompté initialement.
D'autres noms circulent comme susceptibles de faire l'objet d'une introduction en Bourse prochainement, comme Doctolib, Mirakl, ManoMano, Qonto... Mais aucune de ces entreprises n'a vraiment confirmé ce projet.
Pour Deezer, ce sera une deuxième tentative. La plateforme avait renoncé une première fois à son projet en 2015, jugeant les conditions de marché défavorables, notamment après l'annonce du lancement d'Apple Music qui avait fait dévisser le titre du service concurrent Pandora.
Cette fois, les principaux actionnaires de la plateforme française - notamment le milliardaire anglo-américain Len Blavatnik, originaire d'Ukraine soviétique, et qui détient 43% des parts - ont choisi un système d'introduction moins risqué, via le spac I2PO, qui a déjà levé des fonds en Bourse dans le but de fusionner avec une société et faciliter sa cotation.
Ce véhicule d'investissement, fondé par la famille Pinault, l'homme d'affaires Matthieu Pigasse, et Iris Knobloch, ancienne dirigeante de la multinationale du divertissement WarnerMedia qui va prendre la présidence du Festival de Cannes, doit permettre à la plateforme de récolter entre 135 millions et un peu plus de 400 millions d'euros, a indiqué I2PO.
La valorisation de Deezer atteindrait alors 1,05 milliard d'euros (1,08 milliard de francs), soit une décote de 23% depuis l'entrée au capital du groupe mexicain de télévision Azteca en 2020.
Car pour l'instant, l'entreprise accumule les pertes qui ont atteint 123 millions d'euros l'année dernière pour un chiffre d'affaires de 400 millions d'euros.
Lancé en 2007, le service d'écoute musicale par abonnement revendique près de 30% du marché en France, mais ses 9,6 millions d'abonnés ne pèsent que 2% d'un marché mondial du streaming musical, loin derrière le leader suédois Spotify (31% de parts de marché), Apple, Amazon et Tencent, selon le cabinet MIDiA.
'Domination de Spotify'
'La domination de Spotify sur le marché de la musique est très malsaine', estime l'économiste Olivier Bomsel, professeur à Mines Paris Tech, interrogé par l'AFP.
Selon lui, 'il y a matière à être un distributeur plus loyal' envers les majors (Universal, Sony, Warner), notamment en proposant une meilleure exposition de leurs artistes.
En retour, celles-ci pourraient offrir des accords commerciaux plus avantageux, et permettre de pallier au problème actuel du streaming, qui est que les offres sont globalement similaires, tant sur la richesse du catalogue que sur les prix.
La stratégie de Deezer, qui veut plus que doubler ses revenus d'ici 2025, est donc de miser sur la musique et sa technologie, contrairement à Spotify qui multiplie les lancements de podcasts et les recommandations de playlists de musiques d'ambiance.
'Nous pensons qu'il y a une opportunité pour nous de nous rapprocher des artistes et des labels', a expliqué à la presse le directeur général de Deezer Jeronimo Folgueira.
Pour profiter de la croissance rapide du marché mondial du streaming (+26,4% d'utilisateurs en un an au second semestre 2021), Deezer compte aussi s'allier avec des acteurs déjà implantés dans plusieurs marchés clé pour s'appuyer sur des bases clients existantes.
L'entreprise s'est ainsi associée aux opérateurs Orange et SFR en France, avec une filiale Telecom Italia au Brésil, et nouvellement avec RTL en Allemagne.
/ATS