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OMC: attente de mise avant un possible succès à la ministérielle

16.06.2022 19h52 Philippe Verdier avec ATS

Les 164 membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) abordent le bout de la dernière ligne droite après cinq jours de négociations à Genève. Certains prédisent un succès sur un paquet d'accords, de la pêche à la pandémie en passant par la sécurité alimentaire.

Le ministre indien du commerce Piyush Goyal a anticipé jeudi après-midi devant la presse «l’une des ministérielles les plus couronnées de succès depuis longtemps». «Nous allons prendre quelques solides décisions», aussi selon lui. L'OMC, en crise institutionnelle, cherche depuis plusieurs années à aboutir à un arrangement qui montrerait qu'elle est toujours capable d'avancer.

Le ministre indien admet lui-même que tout peut encore changer, les ministérielles de l'OMC n'étant pas exemptes de surprises. «Rien n'est encore fait», a-t-il insisté. L'importance des résultats de cette réunion sera décidée lors d'une discussion entre chefs de délégation, pas attendue avant la soirée.

Le paquet vers lequel les Etats s'acheminent est «assez bon», glisse une source proche des négociations à Genève. Pour la Suisse du conseiller fédéral Guy Parmelin, la conférence est importante, elle qui est sous pression d'Etats et d'ONG depuis plus d'un an pour accepter une levée provisoire des brevets sur les technologies du coronavirus.

Pour Berne, la situation est claire. Elle a répété qu'une telle «dérogation de large portée» ne peut être approuvée. Sur la table, le projet de décision ne s'applique qu'aux vaccins, dont plus de 20 milliards de doses sont désormais déjà sur le marché. De quoi pousser certains ministres à se demander si cet accord est encore utile.

Pêche et aussi pandémie

Pour autant, en cas de consensus, les membres devront se retrouver au maximum d'ici six mois pour aborder la question des médicaments et des diagnostics. Les ONG, comme Médecins Sans Frontières (MSF) et la coalition Alliance Sud notamment, souhaitent une levée totale. A l'inverse, la pharma suisse s'oppose à tout élargissement des exceptions déjà existantes à l'OMC au travers de licences obligatoires.

Dans un projet de déclaration plus large, les membres reconnaîtraient l'importance de faciliter la fabrication et la distribution de toutes les technologies contre le coronavirus. L'Inde, le Sri Lanka et d'autres acteurs auront tenté en vain pendant les négociations d'élargir cet engagement à toute future pandémie, selon une source proche des négociations.

Une approche qui aurait été impossible à soutenir pour la Suisse qui ne souhaite pas avoir à bloquer le consensus à l'OMC. De son côté, la directrice générale de l'organisation Ngozi Okonjo-Iweala a fait de la réponse du commerce mondial à la pandémie son chantier numéro un.

Sur la pêche aussi, un accord semble proche après plus de 20 ans de discussions. A priori, seules les subventions contribuant à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée seraient interdites. En revanche, celles sur la surcapacité et la surpêche seraient pour le moment exclues de tout durcissement.

Américaine déjà partie

Les subventions à la pêche sont estimées au total jusqu'à 54 milliards de dollars par an. Selon l'ONU, 90% des stocks marins sont exploités ou surexploités.

Dans d'autres projets de décisions ou déclarations, les achats alimentaires humanitaires du Programme alimentaire mondial (PAM) seraient formellement exonérés de toute restriction au commerce. Les membres s'engageraient aussi à faciliter le fonctionnement des marchés alimentaires et agricoles mondiaux.

La communauté internationale est inquiète, alors qu'une crise menace en raison du blocage des exportations de céréales ukrainiennes. Selon l'ONU, des dizaines de millions de personnes supplémentaires pourraient être confrontées à une insécurité alimentaire.

Pour leur première ministérielle depuis l'arrivée du président Joe Biden au pouvoir, les Etats-Unis se seront montrés assez discrets. La représentante au commerce Katherine Tai a quitté Genève dès jeudi matin, après de longues heures de négociations et la délégation n'a fait aucune conférence de presse. M. Parmelin n'était pas non plus présent jeudi. D'autres ministres ont déjà quitté Genève.