International

Crimes contre l'humanité au Nicaragua selon les enquêteurs de l'ONU

02.03.2023 14h06

Crimes contre l'humanité au Nicaragua selon les enquêteurs de l'ONU

Certains membres de la police du Nicaragua sont responsables de crimes contre l'humanité selon les enquêteurs de l'ONU (archives).

Photo: KEYSTONE/AP/Alfredo Zuniga

Des crimes contre l'humanité sont perpétrés contre les civils par le gouvernement du Nicaragua, selon les enquêteurs mandatés par l'ONU. Dans leur rapport dévoilé jeudi à Genève, ils demandent des procédures judiciaires et des sanctions à la communauté internationale.

Le Groupe d'experts des droits humains sur le Nicaragua dénonce des exécutions extrajudiciaires, des détentions arbitraires, des centaines de cas de torture ou encore les déchéances de nationalité lancées récemment. Ces actes sont le résultat 'd'un démantèlement délibéré des institutions' et de la destruction des libertés fondamentales.

'Ces violations et abus sont perpétrés de manière large et systématique pour des raisons politiques', affirme le président du groupe, Jan Simon. Ils constituent 'des crimes contre l'humanité'. Et ils 'continuent', a affirmé le président à la presse, ajoutant que les experts ont pu parler avec des centaines d'opposants qui ont fui, en l'absence d'un accès au Nicaragua.

Le rapport met en cause des membres de la police nationale et de groupes armés favorables aux autorités, mentionnant notamment des violences sexuelles. Mais le gouvernement est aussi épinglé, notamment pour avoir utilisé la détention arbitraire comme un instrument contre les dissidents.

Depuis le début de la crise de 2018, plusieurs milliers d'opposants et activistes ont été détenus. Beaucoup ont été retenus à l'isolement et un recours excessif à la force est largement dénoncé par les enquêteurs.

'Arme de persécution'

Selon eux, les hauts responsables du gouvernement ont réussi à 'instrumentaliser' tous les autres pouvoirs et la commission électorale pour établir un 'cadre légal' de la répression. 'L'objectif est d'éliminer, par différents moyens, toute opposition dans le pays', selon le président du groupe.

'L'Etat a été utilisé comme arme de persécution contre la population', a déploré l'une de ses collègues, Angela Maria Buitrago. Le groupe dénonce 'une militarisation des institutions'. Des milliers de personnes ont été contraintes de fuir le pays. Plusieurs centaines se sont vues récemment privées de leur nationalité, s'attirant la colère de l'ONU.

Les autorités ont également fermé de nombreuses organisations. Plus de 3100 ONG ont été confrontées à cette situation et presque toutes les institutions oeuvrent désormais depuis d'autres pays.

Chef de l'Etat aussi ciblé

La situation continue de se détériorer, selon les enquêteurs. Selon eux, le président Daniel Ortega et son vice-président 'ont appliqué des modèles de ces crimes et continuent de le faire'. Et de mettre en cause aussi l'entourage du chef de l'Etat.

Le rapport appelle le gouvernement à libérer 'immédiatement' toutes les personnes détenues arbitrairement, de cesser les violations et les crimes, notamment ceux motivés politiquement. Il demande des investigations indépendantes pour pouvoir poursuivre les responsables.

La communauté internationale doit lancer des procédures judiciaires et étendre les sanctions contre les individus et les institutions en cause, dit-il. 'Sans délai', a également dit le président du groupe. Aucune demande de saisir la Cour pénale internationale (CPI) n'est en revanche relayée et les responsabilités pénales individuelles ne sont pas abordées, même si le groupe peut identifier certaines personnes.

Depuis la crise politique de 2018, des centaines de personnes ont été tuées. La situation au Nicaragua a souvent été dénoncée par la Suisse ces dernières années. L'ONU a elle ciblé les violations, notamment dans le cadre des récentes élections dans ce pays.

/ATS