International

Deux nouvelles exécutions en lien avec les manifestations en Iran

07.01.2023 15h55

Deux nouvelles exécutions en lien avec les manifestations en Iran

L'un des condamnés lors d'une audience de son procès (archives).

Photo: KEYSTONE/EPA/Iranian state TV (IRINN) HO HANDOUT

La justice iranienne a annoncé la pendaison samedi de deux hommes reconnus coupables d'avoir tué un paramilitaire lors des manifestations déclenchées par le décès en détention de la jeune Mahsa Amini. Ces exécutions ont suscité une vague internationale d'indignation.

Mohammad Mehdi Karami et Seyed Mohammad Hosseini étaient accusés d'avoir tué Rouhollah Ajamian, un membre de la milice des Bassidji liée aux Gardiens de la Révolution - l'armée idéologique d'Iran - le 3 novembre à Karaj, à l'ouest de Téhéran. Ils 'ont été pendus ce matin' samedi, a annoncé l'agence de l'autorité judiciaire Mizan Online.

Un tribunal en première instance avait condamné à mort les deux hommes le 4 décembre et la Cour suprême avait confirmé le 3 janvier leurs peines, une justice qualifiée d''expéditive' par des ONG de défense des droits humains.

'Révoltant'

L'ONU a dénoncé des pendaisons 'choquantes' qui portent à quatre le nombre d'exécutions depuis le début du mouvement de contestation en Iran à la mi-septembre. Les Etats-Unis ont condamné 'dans les termes les plus forts le simulacre de procès et l'exécution' des deux hommes. 'Ces exécutions sont un élément clé de la stratégie du régime pour réprimer les manifestations', a tweeté le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.

'Consternée', l'UE a appelé l'Iran 'à mettre immédiatement un terme' à l'exécution de manifestants, selon les services de son chef de la diplomatie Josep Borrell. La cheffe de la diplomatie allemande Annalena Baerbock a indiqué que ces exécutions 'confortaient (Berlin) dans (sa) volonté d'augmenter encore la pression sur Téhéran avec l'UE'.

La France a jugé ces exécutions 'révoltantes' et le Canada 'insensées'. Les Pays-Bas ont dit convoquer l'ambassadeur iranien pour lui faire part de leurs 'graves préoccupations', invitant les pays membres de l'UE à 'faire de même'.

Condamnation suisse

La Suisse a elle aussi condamné 'fermement' ces exécutions. Sur Twitter, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a réaffirmé son rejet de la peine de mort 'partout et en toutes circonstances'.

Depuis le début du mouvement de contestation, 14 personnes ont été condamnées à mort en lien avec les manifestations, selon un décompte de l'AFP basé sur des informations officielles. Quatre d'entre elles ont été exécutées, deux ont vu leur peine confirmée par la Cour suprême, six attendent de nouveaux procès et deux autres peuvent faire appel. Des militants assurent que des dizaines d'autres risquent la peine de mort.

L'Iran est secoué par des manifestations depuis la mort de Mahsa Amini le 16 septembre à la suite de son arrestation pour violation du code vestimentaire strict du pays pour les femmes.

Les responsables iraniens dénoncent des 'émeutes', attisées selon eux par des pays étrangers et des groupes d'opposition, et affirment que des centaines de personnes ont été tuées dans les troubles, dont des membres des forces de sécurité. Environ 14'000 personnes ont été arrêtées, selon l'ONU.

Le désespoir d'un père

Ces dernières exécutions surviennent malgré une campagne d'ONG appelant Téhéran à épargner les deux hommes pendus samedi. Amnesty International avait notamment dénoncé un procès 'inéquitable'.

Mi-décembre, le père d'un des accusés avait diffusé une vidéo sur les réseaux sociaux dans laquelle il implorait les autorités à annuler la condamnation de son fils. L'avocat de la famille, Me Mohmmed Aghasi, a déploré sur Twitter que le jeune homme n'ait pas pu voir une dernière fois sa famille avant de mourir.

Selon l'organisation basée à Oslo Iran Human Rights (IHR), Karami était âgé de 22 ans et selon l'ONG Hengaw, basée aussi en Norvège, Hosseini avait 39 ans.

'Simulacre de procès'

Le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme a dénoncé samedi des procès 'basés sur des aveux extorqués'. 'C'est choquant que l'Iran continue à exécuter des manifestants malgré le tollé international', a-t-il indiqué.

Pour le directeur d'IHR, Mahmood Amiry-Moghaddam, les deux condamnés ont été 'soumis à la torture, et condamnés à l'issue d'un simulacre de procès'.

Téhéran fait l'objet d'une série de sanctions internationales en réaction à la répression des manifestations. Le directeur du Centre pour les droits de l'Homme en Iran (CHRI) basé à New York, Hadi Ghaemi, a accusé l'Iran d'utiliser 'les exécutions et la force létale contre les manifestations pour semer la terreur au sein de la population'.

Nouveau chef de la police

Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a de son côté annoncé samedi avoir nommé un nouveau chef de la police nationale, Ahmad-Reza Radan, pour remplacer le général Hossein Ashtari.

En 2010, le Trésor américain avait mis M. Radan sur sa liste noire pour violation des droits humains après la répression de manifestations déclenchées par la réélection controversée de l'ex-président ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad en 2009.

/ATS