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L'Iran enquête après une vidéo sur des violences policières

02.11.2022 17h19

L'Iran enquête après une vidéo sur des violences policières

Des Iraniens protestent contre la mort de Mahsa Amini (archives).

Photo: KEYSTONE/AP

Les autorités iraniennes ont ordonné une enquête mercredi après la diffusion d'une vidéo montrant des policiers frappant violemment un homme. Le film témoigne, selon des groupes de défense des droits humains, de la brutalité de la répression en cours.

L'Iran est secoué par des manifestations depuis la mort en détention le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, arrêtée trois jours plus tôt par la police des moeurs pour avoir, selon celle-ci, enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique prévoyant le port du voile.

La répression de ces manifestations, sans précédent par leur ampleur et leur nature depuis la Révolution islamique de 1979, a fait des dizaines de morts, selon les ONG.

Brutalité policière filmée

Une courte vidéo, prise avec un téléphone portable et publiée dans la nuit de mardi à mercredi sur les réseaux sociaux, montre une dizaine de membres des forces de sécurité en train d'asséner des coups de matraque et des coups de pied à un homme au sol.

L'homme tente au début de se protéger la tête avec ses mains, mais les policiers continuent de le frapper. On entend le bruit d'un tir puis un policier semble rouler sur lui avec sa moto. La brigade abandonne finalement le corps inanimé.

'Un ordre spécial a été immédiatement émis pour enquêter sur l'heure et le lieu exacts de l'incident et identifier les contrevenants', a annoncé la police dans un communiqué publié par l'agence officielle Irna. 'La police n'approuve absolument pas les comportements violents et non réglementaires et traitera les contrevenants' conformément à la loi, selon la même source.

Violence en toute impunité

L'organisation de défense des droits humains Amnesty International a néanmoins dénoncé des 'crimes' commis en toute 'impunité'.

'Cette vidéo choquante envoyée de Téhéran est un nouveau rappel horrible que la cruauté des forces de sécurité iraniennes ne connaît pas de limites', a déclaré Amnesty.

Dans un contexte 'd'impunité, elles ont carte blanche pour frapper et tirer sur les manifestants', a-t-elle ajouté, appelant le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU à 'enquêter de toute urgence sur ces crimes'.

Selon un nouveau bilan de l'ONG Iran Human Rights (IHR) basée en Norvège, 176 personnes ont été tuées dans la répression des manifestations depuis septembre. Et 101 ont perdu la vie lors d'une vague de protestations distinctes à Zahedan, dans la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est).

IHR a averti que le bilan pouvait être plus élevé, la collecte des informations prenant du temps en raison des perturbations d'Internet causées par les autorités.

Des milliers de personnes ont été arrêtées dans tout le pays, selon des militants des droits humains. Le système judiciaire a lui fait état de 1000 personnes d'ores et déjà inculpées pour leur participation présumée aux 'émeutes', terme généralement utilisé par les autorités pour parler des manifestations.

Le premier procès lié aux manifestations, celui de cinq hommes accusés d'infractions passibles de la peine capitale, s'est ouvert samedi à Téhéran.

Un régime dans l'impasse

'Au lieu d'accepter les demandes (...) de la population, la République islamique (répond) avec des mesures répressives et des simulacres de procès', a fustigé Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur du IHR.

'Les accusations et les peines n'ont aucune validité légale et leur seul but est de commettre plus de violence pour créer la peur dans la société', a-t-il ajouté.

La mort d'Amini a été l'étincelle des manifestations dont les femmes, au départ, ont pris la tête, brûlant leur voile, fustigeant les autorités, rejointe par des écolières ou des étudiants.

L'Iran a connu des explosions sociales ces dernières décennies, mais la particularité du mouvement actuel est d'avoir notamment brisé des tabous, en défiant le régime.

'Le régime est dans une impasse: il risque de soutenir malgré lui le mouvement de protestation en tentant de le réprimer violemment', estime-t-elle.

/ATS