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L'Italie ratifie l'accord sur l'imposition des frontaliers

04.05.2023 15h51

Oui de Rome à l'accord sur les frontaliers, Suisse "blanchie"

Le permis G est l'autorisation délivrée aux frontaliers: selon les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique à fin mars, 91'504 travailleurs italiens traversent la frontière chaque jour, dont 78'230 sont employés au Tessin. Les autres rejoignent les Grisons et le Valais.

Photo: KEYSTONE/Ti-Press/ELIA BIANCHI

Les députés italiens ont approuvé jeudi à l'unanimité le nouvel accord avec la Suisse sur l'imposition des frontaliers. Ils ont amendé le texte, actant notamment la sortie de la Suisse de la liste noire des paradis fiscaux. Le texte revient ainsi au Sénat.

La Chambre des députés a accepté le texte à l'unanimité, avec 239 voix favorables (sur 400 membres), sans opposition. Le Sénat avait déjà donné son feu vert en février. Ce dernier devra se prononcer une nouvelle fois en raison des amendements approuvés par la chambre siégeant au Palais de Montecitorio.

Les amendements ont été proposés par le gouvernement italien après une rencontre le 20 avril dernier entre la ministre suisse des finances Karin Keller-Sutter et son homologue italien Giancarlo Giorgetti.

L'un des changements concerne l'imposition du télétravail. Lors de la pandémie de coronavirus, Berne et Rome avaient conclu en juin 2020 un accord prévoyant 'à titre exceptionnel et provisoire' des règles spéciales sur l'imposition du télétravail. Cet accord n'avait pas été reconduit au-delà du 31 janvier dernier en raison de la fin des restrictions à la libre-circulation.

Chasse aux riches

Le 20 avril, Berne et Rome avaient convenu d'un accord provisoire dans ce domaine jusqu'au 30 juin. Le Département fédéral des finances (DFF) avait précisé que le texte serait signé 'dès que l'Italie aura adopté la base légale permettant de retirer la Suisse de sa liste noire' des paradis fiscaux.

Cette sortie, réclamée depuis de nombreuses années par la Suisse, avait fait l'objet le jour même d'une déclaration d'intention des deux ministres. Le texte adopté jeudi par les députés consacre cette régularisation de la position suisse.

Cette liste avait été mise en place en 1999 par l'Italie. Avec cette mesure, Rome entendait surtout donner la chasse aux stars et aux riches personnalités déclarant une résidence fictive à l'étranger dans le but de se soustraire au fisc transalpin.

'DFF informé'

Contacté par Keystone-ATS, le DFF n'a pas commenté la décision des députés, la procédure parlementaire n'étant pas encore achevée. Interrogé sur les amendements apportés, le DFF confirme cependant qu'il s'agit de la mise en oeuvre de l'entente politique signée le 20 avril. 'Nous avons été informés sur cette manière de procéder', a indiqué un porte-parole, Frank Wettstein.

Le nouvel accord sur les frontaliers doit remplacer le texte existant, datant de 1974. Les Chambres fédérales avaient donné leur feu vert en mars 2022.

L'accord prévoit que la Confédération conserve 80% des impôts à la source prélevés sur les revenus des frontaliers qui travailleront en Suisse à l'avenir. Les 'nouveaux' frontaliers - à savoir ceux qui arriveront après l'entrée en vigueur du traité - sont aussi soumis à l'imposition ordinaire en Italie qui doit, le cas échéant, éliminer la double imposition.

Un rayon de 20 km

Une disposition transitoire s'applique aux personnes qui travaillent ou ont travaillé dans les cantons des Grisons, du Tessin ou du Valais entre le 31 décembre 2018 et la date de l'entrée en vigueur du nouvel accord. Considérés comme 'frontaliers actuels', ils ne seront imposés qu'en Suisse jusqu'à l'année fiscale 2033.

Berne et Rome ont en outre défini avec précision qui est considéré comme un travailleur frontalier. Cela concerne les personnes qui résident dans une commune située dans un rayon de 20 km autour de la frontière et qui retournent 'en principe' chaque jour dans leur commune de résidence.

Selon les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique (OFS) à fin mars, 91'504 travailleurs italiens traversent la frontière chaque jour, dont 78'230 sont employés au Tessin. Les autres rejoignent les Grisons et le Valais. La grande majorité réside en Lombardie.

89 millions pour les communes italiennes

Selon l'accord approuvé jeudi, la Suisse versera une compensation financière aux communes limitrophes italiennes correspondant à 40% de l'impôt à la source qu'elle perçoit. Les agences italiennes évoquent une somme de 89 millions d'euros par année.

Plusieurs députés ont exprimé leur satisfaction à l'issue du vote de jeudi. 'Il s'agit d'un pas en avant important. Il donne des assurances à des milliers de travailleurs italiens en Suisse, et des amortisseurs sociaux aux plus fragiles frappés par la crise de ces dernières années', a relevé Paolo Emilio Russo, un représentant de Forza Italia, l'un des partis au pouvoir en Italie.

La Suisse et l'Italie avaient paraphé un premier projet d'accord en 2015. N'étant pas satisfaites sur certains points, les deux parties avaient ensuite repris les discussions. Les deux pays avaient finalement signé le texte en 2020.

/ATS