La Russie dit qu'elle ne perdra « jamais » la guerre en Ukraine
L'ambassadeur russe à l'ONU à Genève Guennadi Gatilov affirme que son pays ne perdra jamais la guerre contre l'Ukraine (archives).
Photo: KEYSTONE/AP/Fabrice CoffriniLa Russie affirme clairement qu'elle ne perdra 'jamais' la guerre en Ukraine. Jeudi, son ambassadeur à l'ONU à Genève Guennadi Gatilov a dit que Moscou oeuvre à des visites du CICR auprès des prisonniers de guerre. Et qu'elle ne diminuera pas sa présence à Genève.
'Battre la Russie sur le champ de bataille ne sera jamais possible', a dit M. Gatilov auprès des correspondants accrédités à l'ONU à Genève (ACANU). Selon lui, 'les Etats-Unis n'ont retenu aucun enseignement' de la crise des missiles à Cuba il y a 60 ans.
Il a accusé Washington de pousser l'Ukraine à poursuivre la guerre contre son pays. 'La Russie souhaiterait s'engager en faveur d'une solution politique', dit-il aussi. Et M. Gatilov de s'en prendre également à l'UE à laquelle il lance les mêmes reproches. Moscou estime ne pas être responsable de la fin des discussions à Istanbul il y a quelques mois.
Pour autant, l'ambassadeur ajoute que des négociations ne pourront avoir lieu dans tous les cas. 'Un retrait du Donbass ou de la Crimée ne peut constituer un point de départ pour des discussions', dit l'ancien vice-ministre des Affaires étrangères.
Autre indication, la Russie 'travaille' à des visites du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) auprès des prisonniers de guerre ukrainiens. Cinq à six ont déjà eu lieu, selon l'ambassadeur. Mais il n'est 'pas possible' d'organiser des visites auprès de plus de '6000' détenus et 'nous faisons du mieux que nous pouvons', ajoute-t-il également. Il affirme que ces personnes ne sont pas maltraitées.
Problème de sécurité pour Olevnika
Et de demander une 'réciprocité' de la part de l'Ukraine où les détenus russes sont torturés, selon lui. Le CICR a de son côté récemment appelé les parties à garantir des visites auprès de tous les prisonniers de guerre.
Il souhaite notamment accéder au site d'Olevnika, où des dizaines de détenus ukrainiens sont décédés dans un bombardement en juillet dernier. M. Gatilov affirme qu'une visite était prévue début août mais que la situation sécuritaire a changé et que les garanties suffisantes ne pouvaient être données au Comité.
Moscou a aussi été accusée à plusieurs reprises, notamment depuis quelques jours, de déporter de nombreux enfants ukrainiens, ce qui peut constituer une composante de génocide. L'ambassadeur 'ne comprend pas' où est le problème. 'Ces enfants sont sans parent' et 'sont pris en charge', dit-il, rejetant tout kidnapping.
Céréales
Parmi les autres questions, M. Gatilov répète que Moscou pourrait ne pas reconduire l'accord sur l'exportation des céréales depuis les ports ukrainiens, en vigueur depuis juillet dernier pour quatre mois. La Russie a une nouvelle fois relayé son inquiétude sur le volet russe de l'arrangement, déplorant encore des obstacles à l'exportation de céréales et d'engrais qui sont exemptés de sanctions. L'ONU avait elle-même admis récemment que les gouvernements occidentaux devaient faire des efforts.
M. Gatilov dénonce aussi une certaine 'hypocrisie' des Occidentaux quand ils affirment que l'accord sur les céréales sauve le monde de la famine. Plus de la moitié des chargements sont arrivés auprès des pays riches, selon Moscou. Mais l'ONU précise régulièrement que ceux-ci peuvent ensuite aussi être acheminés vers les pays en développement. L'incertitude sur l'accord fait remonter les prix des céréales, a-t-elle aussi déploré jeudi.
Aussi difficile avec Berne
Autres reproches, la Russie maintient son approche actuelle avec la Suisse. 'Nous devons admettre que Genève a perdu sa neutralité' pour accueillir des sommets importants en raison de la reprise des sanctions, répète M. Gatilov. Selon lui, la Suisse n'avait jamais fait preuve d'une attitude aussi hostile avec Moscou.
Se plaignant que des délégations russes ne peuvent venir pour des réunions internationales en raison de restrictions sur les visas, il ajoute que 'la situation pourrait changer'. Des reproches qui tranchent avec les déclarations du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) qui a toujours clairement dit que les Russes participant à des rencontres devaient pouvoir y assister.
Malgré son mécontentement, Moscou ne va pas réduire sa présence à Genève où elle fait face à plusieurs défaites diplomatiques depuis le début de l'offensive en Ukraine en février dernier. Selon M. Gatilov, la mission auprès de l'ONU ne fera pas partie des diminutions de collaborateurs dans les pays occidentaux mentionnées cette semaine par le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov.
Dans une tribune récente, le diplomate russe qui avait démissionné il y a quelques mois explique à quel point seuls quelques pays veulent encore parler à la Russie dans la Genève internationale. Malgré ses appels à ses collègues à quitter leur mandat, il ne semble pas avoir été suivi. 'Nous continuons tous à travailler' à Genève, relève l'ambassadeur.
/ATS