Trois ans de prison requis contre l'ex-tennisman Yves Allegro
Yves Allegro risque trois ans de prison. Il a comparu mardi devant le tribunal cantonal valaisan après avoir fait appel du jugement du tribunal d'arrondissement de Sierre (photo). (Archives).
Photo: KEYSTONE/LAURENT GILLIERONLe Ministère public a requis mardi trois ans de prison ferme contre Yves Allegro pour viol et contrainte sexuelle. La défense a plaidé l'acquittement. L'ex-joueur de tennis professionnel comparaissait devant le tribunal cantonal valaisan.
Les faits reprochés au coach sportif remontent à octobre 2014, lors d'une réunion d'entraîneurs de Tennis Europe à Tallinn (Estonie). Les membres des délégations suisse et autrichienne se sont rendus dans un bar puis Yves Allegro et la plaignante, tous deux alcoolisés, ont regagné la chambre d'hôtel de ce dernier.
Le lendemain, l'un et l'autre disent ne pas se souvenir de ce qui s'est passé durant la nuit. Ils échangent des SMS dans lesquels le Valaisan s'excuse notamment 'pour cette nuit' et son comportement 'pas digne d'un gentleman' et la plaignante s'étonne des bleus et autres marques qu'elle a sur le corps.
'Reconstituer le puzzle'
Selon le Ministère public, qui a fait appel de la décision rendue en première instance (24 mois avec sursis de deux ans pour contrainte sexuelle), Yves Allegro a 'enchaîné les actes sexuels sur la victime. Il a agi de manière brutale' et sa 'violence gratuite' a eu de 'lourdes conséquences sur la victime', notamment d'un point de vue professionnel et de la santé, a déclaré la procureure Corinne Caldelari.
'Les preuves au dossier sont sans appel', a poursuivi la procureure. Les conclusions des rapports médicaux d'experts notamment montrent en substance que 'la répartition et la localisation des blessures constatées sur la plaignante correspondent sans problème aux déclarations de celle-ci'.
La plaignante ne se souvient pas si Yves Allegro l'a forcée à un rapport sexuel. Dans un tel cas, 'le Ministère public doit examiner les éléments et reconstituer le puzzle', a rappelé la procureure.
Et selon elle, les divers éléments montrent notamment que 'le liquide séminal mis en évidence sur le slip de la victime s'est d'abord retrouvé dans son vagin avant de s'écouler et de se fixer sur le slip. L'accusé a donc bien introduit, à tout du moins partiellement son pénis dans le vagin de la victime'.
Le Ministère public, dont le réquisitoire a été appuyé par Me Harald Gattlen, avocat de la plaignante, a demandé une peine privative de liberté de trois ans, soit une année de moins que la peine requise lors du procès de première instance. Il a tenu compte des répercussions de la procédure sur l'activité professionnelle de l'accusé qui a quitté Swiss Tennis et de l'écoulement du temps depuis les faits reprochés qui datent de 2014.
'La clé du dossier'
Me Pierre-Damien Eggly et Me Guillaume Grand ont réfuté la contrainte sexuelle et le viol et ont plaidé l'acquittement de leur client - qui lui aussi a fait appel du jugement de premier instance - dans un dossier qui selon eux est 'truffé d'éléments à décharge'. La plaignante avait 'beaucoup trop bu mais avait encore sa capacité de discernement' selon divers témoignages recueillis, ont-ils indiqué.
Durant ce huis clos nocturne, 'elle ne dira jamais stop' à Yves Allegro, a assuré Me Grand. Et le lendemain, après s'être réveillée avec 'une gueule de bois et dans un état confusionnel', elle ne se souvient de rien, mais voit les marques sur son corps.
Pour la défense, 'c'est la clé de ce dossier: c'est en raison de ses hématomes que la plaignante imagine qu'Yves Allegro l'a agressée. Toute l'accusation se base sur une déduction et non sur des souvenirs'.
'La plaignante ne ment pas intentionnellement, mais elle s'est fait une reconstruction des faits tels qu'ils ne se sont pas passés et ses propos ne sont pas crédibles', a estimé Me Grand. Dans le dossier, 'il n'y a aucun élément tangible qui puisse tendre à prouver qu'il y a eu viol, et il y a notamment un 'doute évident' s'agissant de la manière dont le sperme de son client s'est retrouvé sur le slip de la plaignante. La défense balaie aussi l'accusation de contrainte sexuelle, car 'n'y a aucun moyen de preuves scientifiques, sauf les dires de la plaignante'.
Le dernier mot
La plaignante était présente à Sion, mais n'a pas assisté aux débats. En début d'audience, elle a répondu aux questions du président du tribunal Christian Zuber après qu'Yves Allegro a dû quitter la salle. Elle a confirmé ses dépositions antérieures, a indiqué ne pas avoir de souvenirs supplémentaires de la nuit en question et bénéficier d'une prise en charge thérapeutique, mais de manière plus espacée, pour des troubles liés à l'affaire.
Les derniers mots sont revenus à l'accusé: 'Je vis un calvaire depuis sept ans. Je vous jure que je n'ai jamais fait de mal à personne et que je n'ai jamais forcé la plaignante à faire quelque chose avec moi'. Le verdict tombera ultérieurement.
/ATS