Suisse

Sept zadistes jugés pour l'occupation de la colline du Mormont

17.01.2022 16h01 Julie Zaugg / Céline Argento

zad

À Nyon, sept zadistes de la colline du Mormont sont jugés depuis ce matin. En octobre 2020, des dizaines de militants avaient installé leur campement pour empêcher l’agrandissement de la carrière Holcim. Ils encourent pour la plupart de la prison ferme, pour des peines allant de 2 à 6 mois.

En pleine manifestation « chantante et déterminée ». C’est le dernier événement organisé par les militants pour aujourd’hui. Ils sont présents depuis 8h ce matin pour la plupart. A défaut de pouvoir rentrer dans le bâtiment, les personnes présentes ont entamé des danses sur des musiques symboliques «Jour de manif» de Youri ou encore «Résiste» de France Gall. Lors des auditions on pouvait entendre qu’il se passait des choses au dehors, des cris, des chants mais aussi un procès fictif, joue comme une pièce de théâtre entre les zadistes avec, en prévenu, la cimenterie Holcim.

Début des audiences

Dans deux salles du tribunal se déroulaient ce matin deux audiences. Le procureur général vaudois Éric Cottier représentait le ministère public dans l’une d’entre elles. Face à lui, un jeune zadiste qui a fait opposition à son ordonnance pénale. Il encourt 2 mois de prison ferme et une amende, pour violation de domicile, empêchement d’accomplir un acte officiel et insoumission à l’autorité. Le jour de l’évacuation de la ZAD, le 30 mars 2021, ce jeune homme était en effet suspendu par une corde, sur un tripode fixe. Les forces de l’ordre l’ont récupéré au moyen d’une nacelle.

Cet homme ce matin était accompagné de ses deux avocats, Me von Fliedner et Me Genton. Tous deux ont déploré d’abord la tenue du débat en huis clos partiel, dans des salles petites et ne permettant pas d’accueillir du public. Un des avocats a déclaré:

«La Jeunesse qui prend des risques en faveur de l’humanité est aujourd’hui jugée seule»

Ils ont ensuite pointé du doigt des peines disproportionnées par rapport à l’acte de désobéissance civile en lui-même. La cimenterie Holcim a par ailleurs retiré sa plainte pour violation de domicile depuis les faits. De l’avis des avocats, elle doit donc être retirée des chefs d’accusation.

Il a aussi été mis en avant que l’occupation de la Zad a mis la cause de la colline du Mormont sous les feux de la rampe, «désormais les politiques s’emparent du sujet, c’est une bonne chose. Mon mandant a agi pour une cause qui lui tient à cœur. Il n’a strictement rien fait d’autre que d’être suspendu au bout d’une corde», a expliqué Me Genton qui demande l’acquittement total de son client.

Le mot de la fin a été pour le prévenu de cette affaire: il s’est adressé directement au procureur général en lui exprimant son incompréhension face à ce qu’il qualifie «d’acharnement». Enfin, au Président, le prévenu a lâché:

«L’histoire nous donnera raison, prenez exemple sur elle»

Sera-t-il entendu et exempté de toute peine? Le jugement sera rendu lundi prochain à 11h.

Le rappel des faits

Le 17 octobre 2020, la première ZAD (zone à défendre) de Suisse naît sur la colline du Mormont dans le nord-lausannois, entre la Sarraz et Eclépens. Une ancienne bâtisse est occupée, des tentes et yourtes sont montées. Raison de l’occupation ? Le cimentier Holcim veut étendre sa carrière, zone qu’il exploite depuis 1953.

Durant l’été, plusieurs associations de protection de l’environnement avaient recouru au Tribunal Fédéral. Ils y voyaient une atteinte irrémédiable au paysage et une mise à mal de la biodiversité.

En novembre 2020, alors que les zadistes prennent racine, l’entreprise Holcim dépose plainte pour violation de propriété contre l’occupation de la colline du Mormont. 

Le 24 février 2021, le tribunal d’arrondissement de la Côte ordonne aux zadistes de quitter les lieux dans les vingt jours. Ils seront sinon évacués. Une lettre ouverte signée par 130 élus est adressée au gouvernement vaudois. Elle appelle à l’apaisement. 

Le 30 mars, à 7h30, la police arrive au pied de la colline. Ils donnent trente minutes aux zadistes pour quitter les lieux. Des barrages se forment. Des renforts avaient été appelés par les militants dans les jours précédents l’évacuation pour défendre au mieux les lieux. Dans la matinée, des barricades sont forcées par la police. Des projectiles et engins pyrotechniques sont envoyés sur les forces de l’ordre.

Les zadistes finiront par être évacués. 93 personnes seront interpellées et 45 peines immédiates prononcées. Au total, sur la centaine d’ordonnances pénales rendues, une quarantaine de personnes a fait opposition. D’où les premiers procès ouverts ce jour à Nyon.