Suisse

Des primes auto très différentes selon la nationalité

10.10.2022 18h05 Céline Argento

assurances

C’est la saison des changements d’assurances pour les primes maladies. Mais un autre mercato aurait aussi sa place, pour les primes auto. Si vous êtes Suisse, Français ou Kosovar, la prime auto peut varier du simple au double. La pratique existe depuis 1996 mais elle est très peu connue de la population

Je suis une femme de 29 ans, conductrice depuis 2011, avec une voiture datant de 2017. Si l’on fait cette simulation de responsabilité civile sans casco en étant Suisse, le montant s'élève à 316.- En la changeant par l'italienne, et seulement ce critère, la prime augmente à 341.- Une différence plus importante si je deviens Portugaise, et gigantesque si je suis Kosovare. Nous avons fait le test avec plusieurs compagnies. Certaines montrent des différences plus importantes que d'autres sur ce critère de la nationalité. Jean Tschopp, de la Fédération romande des consommateurs: « il peut y avoir un saut de 80% selon les assurances et les nationalités. C'est injustifiable». 

Statistiques de sinistres

Le phénomène s’explique par la fin des primes uniques en 1996, comme le rappelle Renato Cajas, avocat chez PBM et spécialiste de la question routière. Les assurances contactées rappellent que le  système est basé sur des statistiques comme ici Axa: «Notre politique tarifaire consiste à fixer le montant de la prime en fonction du risque du conducteur ou de la conductrice et du véhicule. Il se fonde également sur plusieurs statistiques sur les sinistres, effectuées sur de nombreuses années.» Ou encore Generali: «Ces critères sont réexaminés à intervalles réguliers et appliqués uniquement s’ils présentent une bonne capacité prédictive et qu’ils sont stables dans le temps.» Autrement dit, on conduirait mieux si l’on est Suisse que la grande majorité des autres nationalités. Mais impossible pour nous d’avoir accès aux chiffres des assurances, comme nous le précise Helvetia: «L'Helvetia ne s'exprime pas sur la conception détaillée de ses analyses de risques. En principe, on peut dire qu'elle se base aussi bien sur des statistiques accessibles au public que sur ses propres enquêtes et valeurs empiriques.». 

Pratique légale et contrôlée

Pour aller plus loin, nous avons même testé la case «apatride» chez notre assureur de départ. L’assurance sort à 504.- comme pour d’autres pays éloignés. Me Renato Cajas: «L'échantillon dans ce cas est très faible, ce qui donne une prime choquante». L’Europe interdit la pratique. Ici en Suisse, plusieurs interpellations parlementaires ont eu lieu il y a dix ans. Mais le Conseil fédéral rappelle la légalité de ce système s’il est uniformément appliqué aux conducteurs. Un controle de l’autorité des marchés financiers, la FINMA, a été effectué en 2011: «L'étude n'a pas révélé sur le marché de différences de primes en fonction de la nationalité non fondées statistiquement ou de non respect des principes actuariels dans la fixation des tarifs.»

La politique en la matière semble donc bien installée. Axa rappelle d’ailleurs les revers d’une éventuelle prime uniformisée: «Elle aurait pour effet que les personnes qui ont statistiquement moins d’accidents seraient obligées de financer celles qui en ont statistiquement plus.» Un conseil pour les automobilistes selon la FRC, faire des simulations. Et trouver l’assurance la plus adaptée à la nationalité.