Genève

Franchise basse, prime réduite: la Lamal des frontaliers au coût (parfois) si bas

01.06.2022 19h12 Martin Esposito

Depuis la suppression des assurances privées françaises, les frontaliers doivent choisir entre le système français et les Lamal dites «frontalier», dont les tarifs n’ont jamais été aussi bas chez certains assureurs. Enquête.

C’est bien connu, se soigner en Suisse coûte cher. Pourtant, pour certains frontaliers, cela se compte en une centaine d’euros chaque mois. Chez Helsana (ex-Progrès), c'est seulement 158 francs par mois, pour un adulte, avec 300 francs de franchise annuelle. L’équivalent pour un habitant genevois chez le même assureur? 554 francs.

Mais pourquoi c’est si peu cher? Tout d’abord -et c’est le point le plus important- les formules Lamal frontières ne sont pas comme nos assurances maladies. Dans le cadre de l’accord sur le libre-échange, les cotisations sont uniquement réparties entre résidents d’un même pays. Par exemple, dans le cas de la France-Voisine, les cotisations sont réparties entre frontaliers et il n’y a pas d’échanges avec les cotisations suisses.

Encadré par la loi

Les Lamal frontalières ne sont pas soumises à un fonds de solidarité. Quand dans une assurance suisse les profils sont trop jeunes, l’assurance doit reverser une part de ses cotisations pour soutenir une autre assurance qui compte dans ses rangs des profils plus âgés. Pour les cotisations outre frontière, ce n’est pas le cas. «Cela favorise la concurrence», remarque le directeur de l’assurance-maladie genevoise, Patrick Mazzaferri. 

Si les écarts entre les Lamal «Suisses» sont faibles, au rayon de leurs cousines frontalières, c’est les montagnes russes. Comptez 269 francs chez Provita, l’une des moins chères, contre 1’395 chez CSS, qui compte seulement une trentaine d’assurés dans ses rangs. 

En plus de cet «avantage», les frontaliers sont des travailleurs. «Ce sont des gens généralement en bonne santé, qui coûtent moins cher à la collectivité», raconte Patrick Mazzaferri. Enfin, la Lamal des frontaliers ouvre, paradoxalement, une porte d’entrée au système de santé français. Chaque assuré peut demander sa carte vitale. Avantage? Les coûts sont réduits dans tous les domaines. Une consultation chez un médecin de famille coûte seulement 25€. Assureurs et frontaliers en sortent gagnant.

Un frontalier sur cinq

Il faut toutefois nuancer ces chiffres. Selon la CPAM de la Haute-Savoie, environ 20% des frontaliers sont affiliés à la Lamal. Un chiffre confirmé côté Genevois. «Les Français préfèrent souvent rester à la sécurité sociale», ajoute Patrick Mazzaferri. Un choix qui ne le permet pas de venir se soigner en Suisse.

L’écart entre les primes frontalières et Suisse énerve. Pourtant, «Il faudrait une base légale appropriée, en tenant compte du fait que les assurés des cantons frontaliers ne devraient pas profiter des frais de traitement plus avantageux des frontaliers dans leur pays de résidence», nous explique-t-on chez Helsana. Les chambres fédérales réfléchissent, elles, étendre le fonds de solidarité aux caisses maladies frontalières.

«Je pense que c’est en Suisse que l’on doit agir»

Natacha Buffet-Desfayes, députée (PLR) au Grand Conseil et membre de la commission de la santé, revient sur la problématique. Elle estime que le cas des frontaliers n'est pas le plus préoccupant: «Je pense que c’est en Suisse que l’on doit agir tout d’abord afin de baisser ou au moins juguler les coûts de la santé». Elle admet toutefois l'attrait des prix affichés et la frustration qui est créée pour les citoyens helvétiques: «C’est évident que cela donne envie […] cela explique que les gens en aient marre en Suisse d’avoir des coûts qui ne cessent d’augmenter».