Genève

Alain Tanner s'en est allé

12.09.2022 18h29 Denis PALMA

ressac

Alain Tanner est décédé hier à l’âge de 92 ans. Profondément engagé, le réalisateur genevois a incarné le nouveau cinéma suisse à la fin des années 60. Un cinéma romand naissant marqué par son indépendance et son impertinence. 

Un Léopard d'or pour «Charles mort ou vif» en 1970 

Pour Alain Tanner tout démarre en 1969 avec «Charles mort ou vif». Cette critique de la Suisse des années 60 obtient le Léopard d’or au Festival de Locarno. Viendra ensuite, la Salamandre en 1971, œuvre majeure d’Alain Tanner. Ce film libertaire devenu culte a été incarné à l'écran par Jean-Luc Bideaux et Jacques Denis. Ce symbole de la nouvelle vague suisse a connu un succès retentissant à l'étranger. Dans la filmographie du cinéaste genevois, vingt longs métrages: parmi eux, Fourbi. Un film qui révèle en 1983 un jeune actrice française: Karine. Elle crève déjà l'écran.  

Une œuvre, sincère, singulière et authentique 

Proche d’Alain Tanner depuis les années 2000, le réalisateur genevois Frédéric Choffat rend hommage à son œuvre, sincère, singulière et authentique. « Pour moi c’est quelqu’un qui a toujours fui le glamour, le paraitre, la mode, pour raconter le Suisse, son amour de la Suisse mais aussi sa colère contre la Suisse. Donc c’est un cinéma politique, engagé, rugueux et brut. Je me suis toujours reconnu dans son cinéma et sa parole», raconte le réalisateur.   

Fondateur du nouveau cinéma suisse 

Gérard Ruey a travaillé 20 ans avec Alain Tanner sur une dizaine de films. Il se rappelle le rôle majeur joué par le réalisateur genevois avec le groupe des cinq (Michel Souter, Claude Goretta, Jean-Louis Roy, Jean-jacques Lagrange) dans l’émergence du cinéma romand à la fin des années 60. «Dans les années 60, début 70, le cinéma Suisse romand n'existait pas. Il y avait des films en Suisse alémanique mais il n'y avait rien dans le cinéma d'auteur. Mais avec les nouveaux outils de l'époque, les caméras 16 millimètres, plus légères, ils ont utilisé ce matériel, emprunté à la télévision suisse romande, pour faire des fictions avec très peu de moyens», contextualise le président de l'association Alain Tanner qui lutte depuis 2017 pour digitaliser l'ensemble de l'oeuvre du réalisateur genevois.  

Dans «Paul s’en va» dernier film d’Alain Tanner en 2003, le cinéaste genevois évoque la transmission de la mémoire incarnée par 19 jeunes comédiens qui regardent au bord du Rhône les cheveux au vent vers l’avenir. Alain Tanner s’en est allé mais son œuvre, elle, restera.