Genève

la France pourrait faire payer ses soignants qui partent travailler en Suisse

01.12.2022 18h30 Lucie Hainaut

HUG HUG

Le Pôle métropolitain du Genevois français envisage de faire payer les élèves infirmiers s’ils partent travailler en Suisse après leur formation en France. Mais la proposition n’est pas du goût de tout le monde.

Comment garder les élèves infirmiers formés en France, après l’obtention de leur diplôme? Le Pôle métropolitain du Genevois français envisage une nouvelle mesure, dévoilée dans la Tribune de Genève: «Les élèves infirmiers seraient rémunérés pendant une partie de leur formation. Et contre cette rémunération, ils signeraient un contrat qui les engage à travailler en France pendant 5 ans» explique Christian Dupessey, président du Pôle métropolitain du Genevois français et maire d’Annemasse. Selon lui, la base légale pour une telle proposition existe déjà: «Les profs, j’en étais un, ont eu leurs études payées. Et contre cela ils signaient un contrat – je l’ai fait – de 10 ans d’enseignement dans un établissement français. Donc légalement, ça existe» rassure-t-il.

Une mesure qui tombe à côté?

Cette mesure ne vise pas la bonne cible, selon les syndicats: ils considèrent que côté français, l’État devrait plutôt revaloriser la profession via les salaires. Et la rémunération n’est pas le seul problème: «Comme il y a un manque d’effectifs, on demande toujours plus à ceux qui restent. Alors qu’est-ce qu’il se passe pour ces gens-là? Soit ils fuient parce qu’il y a des conditions de travail épouvantables, soit ils sont en épuisement professionnel» s’insurge Angélique Neutens, secrétaire syndicale à la CGT. Le syndicat pense qu’une telle proposition pourrait même rendre la formation en soins infirmiers moins attractive en France. Un risque que balaie Christian Dupessey: «Quand vous êtes étudiant et qu’on vous dit que votre deuxième année de formation, vous serez rémunéré par exemple 1000€ par mois, ça devient attractif» justifie-t-il.

«une entrave inadmissible à la libre circulation»

Côté genevois, les HUG disent comprendre le sens et le contexte de la proposition du Pôle métropolitain du Genevois français: «C’est pour cette raison que nous nous sommes engagés, il y a longtemps déjà, à ne pas débaucher de personnel en emploi en France voisine et que nous soutenons les propositions visant à accroître sensiblement la formation de soignants à Genève» explique le porte-parole de l’institution, Nicolas de Saussure. Questionné sur la proposition, Mauro Poggia, conseiller d’État en charge de la santé à Genève, est dubitatif: «En l’état actuel des accords bilatéraux, cette mesure pourrait bien être considérée comme une entrave inadmissible à la libre circulation» déclare-t-il.

Genève est dépendante de la France pour son système de santé: 57% de son personnel soignant possède un diplôme français. De l’autre côté de la frontière, 40% des soignants haut-savoyards travaillent en Suisse.