Genève

«Alireza était une personne positive pour la Suisse »

05.12.2022 19h12 Delphine Palma

Alireza

Émotion et indignation. Le suicide d’un jeune requérant d’asile d’origine afghane, la semaine dernière, suscite un immense désarroi dans le milieu de l’asile. Le jeune homme venait de recevoir une décision de renvoi. Ses amis se sont réunis aujourd’hui devant le foyer de l’Etoile pour lui rendre hommage.

Ils sont une trentaine de jeunes hommes à se retrouver à la mi-journée devant le foyer de l’Etoile,à l'endroit où vivait leur ami Alireza. Tous le connaissaient, comme Sajad, un de ses amis proches qui vit aussi au foyer. «C’était mon camarade, on faisait du sport ensemble, on étudiait toujours ensemble dans sa chambre. Aujourd’hui, je suis très très choqué.»

Le choc et la colère. Ses amis dénoncent une décision de renvoi injuste envers un jeune intégré et volontaire. «Il avait appris le français très vite. Il aimait le violon, il était sportif. C’est une personne positive pour la Suisse.»

Risque suicidaire

La veille de son geste, Alireza était venu à une permanence du Centre Social Protestant (CSP) pour chercher de l’aide suite à la décision de son renvoi vers la Grèce.  Ici aussi, la décision des autorités fédérales choque, en raison notamment de l’état psychologique fragile du jeune homme. « Aussi bien le Secrétariat d’Etat aux Migrations (SEM) que le Tribunal administratif fédéral avait sous les yeux un rapport médical qui attestait clairement que ce jeune courrait des risques de suicide en cas de renvoi», analyse Raphaël Rey, porte-parole sur les questions d'asile au CSP. «On a vraiment l’impression que cette décision a été prise sans tenir compte de cet avis médical. »

Retour en Grèce

Autre incompréhension: Alireza devait être renvoyé vers la Grèce. Un pays vers lequel la Suisse s’abstient en principe de renvoyer les requérants fragiles psychologiquement. Le conseiller national Christian Dandrès demande des éclaircissements de la Confédération. «Si c’est un cas particulier, il faut qu’une enquête soit faite, car c’est proprement inacceptable. Si c’est une pratique du SEM de renvoyer des personnes en Grèce alors qu’on sait qu’il y a une menace sur leur santé, alors il faut changer cette pratique.» 

Au foyer de l’Etoile, les amis d’Alireza ont préparé des banderoles pour partager leur colère. Une manifestation est prévue jeudi en fin d’après-midi contre la politique d’asile de la Confédération et les renvois effectués par le canton de Genève.

«L’exécution de cette décision par la Berne fédérale engendre de l’inhumanité»

Le conseiller d'Etat genevois Thierry Apothéloz a réagi à ce drame sur ces réseaux sociaux. Il justifie son action et fustige les autorités de la capitale: « L’exécution de cette décision par la Berne fédérale engendre de l’inhumanité que je comptais dénoncer [...] Le Tribunal administratif fédéral et le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) n’ont pas pris en compte ce dossier et ce jeune homme».

Sur les responsabilités cantonales, le conseiller d’Etat rappelle l’existence d’une délégation du Conseil d’Etat permettant d’aller au-delà de la simple exécution de renvoi ordonnée par Berne et de «prendre ses responsabilités».

Manque de moyens pour les requérants d'asile?

A l'éventualité d'un manque de moyens dans les foyers pour requérants d'asile, Thierry Apothéloz affirme que les moyens sont donnés à L'Hospice Générale pour exercer l'accueil nécessaire et qu'il n'y a pas plus d'argent destiné aux Ukrainiens que pour les autres: «Tous les crédits supplémentaires et les budgets destinés aux migrants, quelque soit leurs origines ont été approuvés par le Conseil d'Etat et appuyés par le Grand Conseil».