Genève

Santé mentale: «L’isolement sur un réseau social n’est pas une bonne chose»

12.12.2022 19h30 Rédaction

La santé mentale des jeunes a beaucoup souffert durant les années de pandémie, surtout côté féminin. Entre 2020 et 2021, les hospitalisations des filles et jeunes femmes de 10 à 24 ans pour troubles mentaux et du comportement ont bondi de 26%. Stephan Eliez, professeur au département de psychiatrie à l’Unige, nous explique pourquoi.

«La santé mentale des jeunes s’est beaucoup péjorée durant le Covid et ce n’est pas un phénomène purement Suisse. C’est quelque chose que l’on retrouve dans tous les pays d’Europe qui ont étudié ce phénomène», explique Stephan Eliez. Il y a de quoi:  entre 2020 et 2021, les hospitalisations des filles et jeunes femmes de 10 à 24 ans pour troubles mentaux et du comportement a bondi de 26%. Chez les plus jeunes filles de 10 à 14 ans, la hausse a même atteint 52% entre 2020 et 2021, a annoncé l'Office fédéral de la statistique (OFS). La poussée a été plus contenue côté masculin. Chez les hommes âgés entre 10 et 24 ans, elle a atteint 6%. Les troubles mentaux constituent pour la première fois la première cause des hospitalisations des 10 à 24 ans, avec 19'532 cas, devant les blessures (19'243 cas), précise encore l'OFS.

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Le professeur au département de psychiatrie à l’Unige n’est pas surpris par ces chiffres: « La plupart des psychiatres et psychologues avaient observé une nette augmentation du nombre de demandes, puis une augmentation des durées d’attente. Tous les lits d’hôpitaux étaient remplis durant cette période. Ce sont surtout les jeunes les plus vulnérables qui ont payé le prix le plus important.»

L’écart d’impact entre les filles et les garçons pourrait s’expliquer par des facteurs biologiques: «On ne comprend pas pourquoi il y a une telle différence, mais elle existe depuis toujours à travers toutes les cultures», explique Stephan Eliez.

Une dépendance au like

Si le Covid a été un catalyseur pour ces hospitalisations, le phénomène n’est pas sorti de nulle part, à en croire une étude de la fondation McKinsey. «D’une génération à l’autre, les jeunes vont moins bien et particulièrement les 15-25 ans.» Les réseaux sociaux et la pression sociale autour de l’insertion dans le monde du travail sont les deux facteurs de stress principaux. «Il y a une appréhension autour de la présence et du sentiment de devoir être vu, explique-t-il. En même, on est de plus en plus dépendant du like, du fait d’être apprécié. Pour les jeunes qui vont moins bien, l’isolement sur un réseau social n’est pas une bonne chose.»

Ces jeunes ont tendance à utiliser ces mêmes réseaux pour sortir de cette situation: «Les jeunes cherchent de plus en plus à utiliser des applications qui peuvent les aider, les soutenir, voire faire appel à des groupes en ligne. Si les jeunes font ces démarches, on doit se demander si cela les soutient vraiment.»