Genève

«Il y a encore trop une culture de la peur de la sanction au DIP»

20.12.2022 11h23 Rédaction / ATS

cour des comptes

A Genève, la Cour des comptes s'est penchée sur la gestion des risques et des alertes au DIP. Risques mal identifiés, freins à la communication des alertes et insuffisance de la collaboration interdépartementale figurent parmi les constats.

Rendu public mardi, l'audit de la Cour des comptes a pour toile de fond l'affaire du foyer pour jeunes autistes de Mancy géré par l'Office médico-pédagogique (OMP) du Département de l'instruction publique (DIP). La structure s'est retrouvée dans la tourmente après que de graves dysfonctionnements ont été dénoncés dans la presse, avec des cas de maltraitances d'enfants et un personnel visiblement dépassé.

Cette affaire a donné lieu à l'ouverture de procédures pénales, ainsi qu'à des rapports d'experts externes et du service d'audit interne de l'Etat. Sollicitée par la sous-commission 'Foyer de Mancy' du Grand Conseil, la Cour des comptes ne s'est pas focalisée sur le cas spécifique du foyer, a souligné mardi sa présidente Isabelle Terrier lors de la présentation de son audit de conformité.

«Droit à l'erreur»

Alors que le DIP a une 'tolérance zéro' en matière de maltraitance, le dispositif de gestion des risques ne permet pas toujours de les identifier ni de les prévenir, ce qui en fait plutôt un outil de gestion de crise, a relevé la magistrate. En outre, comme dans le cas de locaux pour l'accueil de jeunes avec des troubles, les risques concernent aussi d'autres départements, mais la coordination est insuffisante.

Le DIP a aussi mis en place un dispositif de gestion des alertes, mais il n'est pas conforme aux meilleures pratiques, selon la Cour qui a adressé un questionnaire aux collaborateurs de l'OMP, de l'Office de l'enfance et de la jeunesse et du secrétariat général. 'Une analyse fine montre un climat de défiance entre la hiérarchie et les collaborateurs qui ne sont pas suffisamment incités à signaler les problèmes ni soutenus dans leur démarche', indique Mme Terrier.

'Les problèmes de communication génèrent des blocages', déplore la magistrate. Selon elle, l'anonymat doit être possible face à la peur des sanctions: 'Ce qui importe, c'est la transmission de l'information et son suivi afin d'éviter la survenance de problèmes graves.' Pour la cour, le DIP doit favoriser 'une culture permettant le droit à l'erreur du collaborateur', à l'image de ce qui se fait aux Hôpitaux universitaires de Genève.

Recommandation refusée

Sur les sept recommandations de priorité 'élevée' à 'très élevée' émises par la Cour des comptes, le DIP a refusé celle qui consiste à mettre en oeuvre de manière plus rigoureuse la méthodologie de gestion des risques. 'Les collaborateurs ne sont pas au clair sur le type d'incident à signaler. Si cette première étape fait défaut, il y a une cascade de problèmes', prévient Mme Terrier.

'Le DIP travaille d'arrache-pied pour mettre en place un outil de pilotage, l'outil actuel étant trop manuel', a indiqué sa secrétaire générale Paola Marchesini. Selon elle, la communication, plus que la méthodologie, doit être améliorée. Les problèmes à l'OMP sont, eux, dus à un taux d'encadrement insuffisant: 'Les effectifs de terrain ont augmenté. Les cadres sont submergés et n'ont pas le temps de construire une relation de confiance.'

L'audit de la Cour des comptes sera intégré aux travaux de la sous-commission ad hoc de la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil. 'Une vision plus politique sera donnée dans quelques mois', a assuré son président, le député PLR Cyril Aellen.