Éditorial - Nous sommes toutes et tous les enfants maltraités du foyer de Mancy
ÉDITORIAL – Au-delà du constat de la négligence à tous les étages et d'une gestion chaotique du foyer de Mancy du début à la fin, notre rédacteur en chef Jérémy Seydoux s'interroge: qui pour rétablir la confiance et restituer la noblesse des missions de l'État?
La gabegie est patente, généralisée. Elle puise ses racines dans un département désorganisé et dysfonctionnel. Résultat: les risques que personne n’ignorait se sont concrétisés, le pire est arrivé. Ces familles brisées dont le trésor le plus précieux a été confié l’État, leurs enfants, ont été trahies. C’est d’abord un drame, c’est aussi un échec impardonnable.
En amont et en aval, la réponse politique a été terrible. Alertes de parents pas prises en compte, foyer ouvert en marge de tout cadre légal, nomination d’équipes pas adéquates, à tous les étages, absence de suivi.
En aval, à part chercher à sauver la face, le département n’a pas fait le travail, les mesures n’ont pas été prises, les plaintes pénales ont trop tardé, et l’audit lancé par la conseillère d’État a été confié à des copains.
«La réponse institutionnelle est au fond assez triste, assez cynique.»
Sans la presse, serions-nous là, à prendre la mesure du désastre et poser les pierres de la reconstruction? Non. Rien. Absolument rien de ce qui a été publié jusque-là s’est avéré faux. À chaque étape, pourtant, de la part du département: déni, demi-vérités, "c’est la faute des autres".
La responsabilité politique est engagée. Elle est totale, incontestable. Nul n’est besoin d’enfoncer le clou, mais la magistrate, sur les dernières semaines de son mandat, devrait au moins avoir l’élégance de se faire discrète et d’attendre l’arrivée de la personne qui lui succédera.
Panser les plaies, penser aux sans voix
Car là se trouve le principal enjeu. Qui pour mettre en œuvre les 10 recommandations essentielles adoubées aujourd’hui par l’ensemble des partis politiques de ce canton? Qui saura relever ce défi immense, herculéen: nettoyer les écuries d'Augias, mais reconstruire, rebâtir la confiance, réparer, soigner, panser les plaies, non pas d’un seul et unique département isolé, mais de l’État dans sa globalité, restituer la noblesse de ses missions, au service du peuple, de tous ces anonymes, ces sans voix.
L’État doit retrouver à son sommet une véritable équipe d’hommes et de femmes politiques avec une vision commune pour Genève.
Ce soir, nous sommes toutes et tous les enfants maltraités du foyer de Mancy.
Jérémy Seydoux
Rédacteur en chef