Genève

Le non-recours aux aides aggrave la précarité

21.03.2023 18h28 Lucie Hainaut

Précarité

La précarité augmente à Genève : c’est en tout cas le constat du Centre Social Protestant. L’organisation note une augmentation de l’aide directe et privée, comme les colis alimentaires ou le Vestiaire social. Elle alerte sur le non-recours aux prestations sociales. 

«Dans le monde des gens sans papiers, nous pensons que tout est impossible: si tu demandes de l’aide, tu n’auras pas ton permis. Si tu demandes de l’argent, tu n’auras pas ton permis…» Maria vit en Suisse depuis 12 ans: elle a résidé durant plusieurs années à Genève sans permis de séjour, avant de pouvoir régulariser sa situation il y a deux ans. Pendant longtemps, elle n’a pas osé demander d’aide. Alors pour joindre les deux bouts, elle a dû contracter des dettes privées: «Tu ne t’inquiètes pas, tu paies quand tu peux. Tu paies seulement les intérêts chaque mois. Mais les intérêts c’est 10% du prêt chaque mois. J’ai mis un an à payer le capital, donc j’ai payé 3600 francs en intérêts, plus les 3000 francs qu’ils m’ont prêté» explique la jeune femme. 

«Certaines prestations sociales sont difficiles d’accès»

Une situation que le directeur du CSP ne connaît que trop bien. Selon lui, plusieurs raisons expliquent que le non-recours aux prestations sociales: «La première, c’est la question de la complexité. Certaines prestations sociales sont difficiles d’accès. Les prestations complémentaires pour les familles par exemple, c’est un parcours du combattant et un questionnaire complexe qui nécessite l’accompagnement d’un professionnel pour être obtenues. La seconde, c’est la question de la connaissance du droit à ces prestations» détaille Alain Bolle, directeur du CSP Genève. Sans compter les personnes qui, comme Maria, n’osent pas demander d’aide de peur de se voir refuser un permis de séjour. 

«Solliciter plus rapidement ça veut dire régler plus rapidement une situation»

Thierry Apothéloz est bien conscient de la problématique. Selon lui, le non-recours aux aides ne fait que repousser le problème: «Solliciter plus rapidement ça veut dire régler plus rapidement une situation, ça évite qu’elle ne se dégrade et que l’état n’ait besoin d’investir plus. C’est ce qu’on appelle un investissement social utile. C’est très court-termiste que de croire qu’on fait des économies quand les gens n’accèdent pas à leurs prestations, au contraire» martèle le conseiller d’État en charge de la cohésion sociale.

Pour combattre le non-recours, le CSP suggère entre-autres l’octroi automatique d’aides, mais aussi la généralisation de guichets d’information sociale, afin d’orienter au mieux les ayants-droits.