«Abus des ressources publiques», la Ville à son tour épinglée par la Cour des Comptes
Dans le sillage de l’affaire Fischer, le gendarme des deniers publics a cherché à savoir si la Ville de Genève était aussi concernée par une potentielle utilisation des ressources publiques à des fins privées. Réponse: oui. La Ville dénonce «un effet d'annonce» visant à «jeter le discrédit sur la classe politique».
Un courrier daté du 17 décembre 2024 et publié sur le site internet de la Cour des Comptes ne manquera pas d’échauffer les esprits à l’approche des fêtes et à quelques mois des élections municipales. Faisant suite à une communication citoyenne portant sur l’utilisation des ressources publiques à des fins privées en lien avec la fonction de collaborateur personnel des conseillers administratifs, la Cour des Comptes a adressé une lettre circonstanciée à l’exécutif.
Préparation de congrès, de campagne électorale ou gestion des réseaux sociaux personnels
La missive indique: «Au cours de ses travaux, la Cour a pu constater que le Conseil administratif de la Ville de Genève admet clairement que des auxiliaires, membres du personnel de la Ville, puissent participer à des activités privées et politiques telles que la préparation de congrès de parti, de campagne électorale ou la gestion des réseaux sociaux personnels des magistrats.»
La Cour rappelle que cette situation est «sans fondement légal» et est «contraire aux bonnes pratiques»: «L’utilisation abusive des ressources publiques constitue un obstacle structurel au bon déroulement des opérations électorales et est susceptible d’affecter les processus électoraux et le libre arbitre des électeurs en conférant un avantage aux membres de l’exécutif communal candidats à leur réélection.»
La Cour demande des correctifs
La Cour des Comptes suggère au Conseil administratif d’adapter le cadre d’action des collaborateurs personnels pour mettre fin à ces pratiques, via une directive, de modifier les cahiers des charges en conséquence et de prendre connaissance du rapport de la Cour au sujet des communicants de l’État, et plus particulièrement du chapitre dédié aux risques inhérents à l’utilisation des ressources publiques à des fins privées.
La Ville «s'étonne»
Dans un communiqué de presse, le Conseil administratif de la ville indique «prendre acte avec intérêt des recommandations de la Cour des comptes», mais dit vouloir provilégier un «échange constructif plutôt qu'un effet d'annonce.» Il regrette des «affirmations approximatives» et relève que cet examen sommaire de la Cour ne se base sur «aucun élément concret».
L'exécutif «s'étonne du calendrier choisi pour cette communication (...) donnant l’impression de vouloir jeter le discrédit sur la classe politique à trois mois des élections municipales». La Ville dit aussi ne pas avoir pu faire valoir son droit à être entendu avant la publication des recommandations.
«Tâches essentielles»
Enfin, la municipalité rappelle que les fonctions de collaborateurs personnels ont été créées en 2007 «dans le but précisément d’éviter que des fonctionnaires de la Ville ne se retrouvent en situation de devoir assumer des tâches de nature politique au sens large en appui aux magistrats, par exemple faire le lien avec les partis politiques ou les parlementaires, tâches essentielles pour assurer le suivi, la mise en place, l’amélioration et le développement des politiques publiques.» Et de rappeler que cette fonction existe dans d'autres cantons.