Genève

Accusations contre Mgr Genoud: «Nous ne savons pas si c’est une parole de vérité»

12.12.2023 19h37 Rédaction

Mgr Bernard Genoud, ancien évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, décédé en 2010, est accusé d'actes d'ordre sexuel sur une femme de 19 ans à l'époque où il enseignait au Collège du Sud, à Bulle. Pour l’avocat Me Karim Raho, cette affaire est symptomatique des dérives du mouvement Me Too. 

L’Église catholique est à nouveau dans la tourmente. L’évêque Charles Morerod accuse son prédécesseur Monseigneur Genoud, décédé depuis 13 ans, d’actes d’ordres sexuels sur une femme âgée de 19 ans au moment des faits qui se seraient déroulés il y a plus de 30 ans. Elle était étudiante de Bernard Genoud, professeur de philosophie, dans l'établissement gruérien.

Ces accusations font monter au créneau Me Karim Raho, pénaliste et président de la commission de droit pénal. Il identifie plusieurs problèmes dans le mouvement Me Too. S’il salue la libération de la parole, la forme est problématique selon lui: «Si la parole se libérait systématique devant les tribunaux, je crois que personne ne viendrait contester un tel mouvement. Le problème ici, c’est que la parole se libère dans d’autres espaces et notamment dans l’espace médiatique. Cela pose un problème pour la défense de la personne accusée.» De plus, Mgr Bernard Genoud est décédé et ne peut pas se défendre. Enfin, le témoignage est anonyme et peu d’éléments sont communiqués. «Je ne suis pas sûr qu’il faille se réjouir de ce genre de libération», commente l’avocat.

«Lors d’un procès pénal, il y a des droits qui doivent être respectés, ce sont des garanties»

Me Karim Raho ajoute que la crédibilité de la parole doit être examinée par les autorités pénales: «Il est insensé de croire qu’une personne lambda, qui n’aurait pas les outils dont la justice peut disposer, peut arriver à la conclusion qu’une parole est crédible ou non.» À cela, il rappelle l’évolution de la prise en charge des victimes et le respect de leur parole: «Il est absolument faux de penser que les avocats de la défense collectionnent les acquittements dans de ce genre de contexte. La parole des victimes est correctement recueillie durant les procédures. Toutefois, il faut que les gens comprennent que lors d’un procès pénal, il y a des droits qui doivent être respectés, ce sont des garanties. (…) Aujourd’hui, nous pouvons nous vanter d’être dans un état de droit et c’est aussi le fait de confier la résolution des litiges à un tribunal.»

Autre point, les faits remontent à au moins 30 ans. Selon l’avocat pénaliste, «il faut accepter l’idée que l’écoulement du temps rend la démonstration de la culpabilité d’une personne plus compliquée». La prescription est une garantie des droits, explique-t-il. Enfin, s’il ne conteste pas l’idée que la plaignante a pu être sous l'emprise de Mgr Genoud, il rappelle que «l’examen de cette question doit revenir aux juges».