Genève

Affaire des écoutes: que dit la loi sur cette mesure de surveillance?

07.03.2024 18h46 Lucie Hainaut

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Le scandale des écoutes a éclaté il y a plus d’un an maintenant. En parallèle de l’instruction elle-même, la question de la mise en pratique de cette mesure de surveillance se pose: qui peut être mis sur écoute? À quelles conditions? On fait le point.

Se pourrait-il que vos conversations soient enregistrées? La mise sur écoute est régie par la loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication. Elle n’est permise que s’il y a des soupçons d’infraction grave, et s’il n’y a pas d’autre moyen pour obtenir des preuves. Une mise sur écoute est ordonnée par le procureur pour une durée de trois mois renouvelable de fois en fois: «Le magistrat va signer un ordre d’écoute et l’écoute sera immédiatement mise en œuvre, car il faut souvent agir rapidement. Ensuite de cela, le procureur doit soumettre le cas dans un délai de 24 heures à un juge indépendant, un juge du tribunal des mesures de contrainte. Il va vérifier et ratifier – ou pas – l’ordre d‘écoute. D’ailleurs s’il ne ratifie pas l’ordre d’écoute, tout ce qui a été écouté sera sorti du dossier» détaille Yvan Jeanneret, professeur de droit pénal à l’Université de Genève. 

«Les écoutes coûtent horriblement cher»

La mise sur écoute est une mesure secrète: les personnes ne sont en général pas notifiées sur le moment. C’est plus tard dans la procédure qu’elles sont informées, elles peuvent alors recourir contre les écoutes. Selon Yvan Jeanneret, cette mesure de surveillance n’est pas ordonnée à tout va: «Les écoutes coûtent horriblement cher. Et donc les Ministères publics ne mettent pas comme ça à la légère des mesures qui représentent des investissements relativement considérables» tempère-t-il.

Toutes les formes de communication sont concernées

Le professeur de droit pénal rappelle un autre élément: «Les dispositions sur l’écoute concernent bien plus largement la surveillance secrète des communications: les lettres, les paquets, des e-mails, des sms, des WhatsApp… Tous les moyens de communication du courrier postal au sms en passant par le message WhatsApp, sont aussi des échanges susceptibles d’être surveillés» énumère le spécialiste. 

Empêcher les écoutes couvertes par le secret professionnel

Après nos dernières révélations sur l’affaire des écoutes, l’Ordre des avocats de Genève a envoyé un courrier à ses membres. Il dit travailler à une solution avec le Ministère public, pour éviter à l’avenir l’écoute de conversations couvertes par le secret professionnel comme le sont celles entre un prévenu et son avocat: «À la suite de l'intervention de l'Ordre des avocats, le Ministère public est en train de mettre en place une solution technique, novatrice en Suisse, qui empêchera, à la source, l'écoute de conversations avec les bénéficiaires d'un secret professionnel en les identifiant automatiquement et immédiatement aux fins qu'elles soient soumises au Tribunal des mesures de contrainte» explique la missive. Avec ce nouveau système, les numéros de téléphone des avocats seraient enregistrés: il permettrait alors une automatisation de l’identification des conversations avec un avocat.