Antonio Hodgers: «C’est le sentiment intime de la fin d’un cycle»
Antonio Hodgers a annoncé sa démission du Conseil d’État. Après plus de 30 ans de vie politique, il évoque la fin d’un cycle et un choix mûrement réfléchi.
Pour Antonio Hodgers, l’heure est venue de passer le témoin: «J’ai le sentiment intime de la fin d’un cycle. J’ai réalisé la plupart des réformes que j’entendais mener.»
«Il me semblait plus respectueux du peuple et des institutions de partir, de ne pas rester pour rester au pouvoir et attendre la fin du mandat, explique-t-il.» Le conseiller d’État démissionnaire affirme avoir pris sa décision dans un esprit d’honnêteté: «C’est une décision personnelle, intérieure, du rapport au pouvoir.»
Il insiste: «Le pouvoir, ce n’est pas une fin en soi, mais un moyen de réaliser un projet politique.» Quant à son action politique, l’élu vert reconnaît «des succès et des échecs».
Une forme de lassitude politique
Antonio Hodgers nie toute fatigue vis-à-vis du fond du travail politique: «Moi, je peux faire ça encore 20 ans. J’adore ça. J’adore la politique au sens noble: s’occuper des enjeux de la cité.» En revanche, il se dit usé par le climat politique actuel. «Ce que j’appellerais la politique de bas étage, la polémique préférée au débat, très peu de contenu politique», dénonce-t-il.
Élu en 2023 pour cinq ans, Antonio Hodgers quitte son siège après deux années. Un choix qu’il dit avoir longuement pesé, redoutant de manquer au devoir conféré par le vote des citoyens. «Ce dilemme m’a beaucoup habité, reconnait l'ancien président du Conseil d'État. Mon cycle politique ne correspondait pas au cycle électoral.»
Il défend sa décision en soulignant les réformes menées: «Regardez ce que j’ai fait en deux ans. On a la Loi sur l’énergie la plus ambitieuse de Suisse. On a un accord historique sur le climat, une loi générale sur les eaux.» Il conclut: «Le plus grand respect qu’on doit à l’électeur, c’est l’honnêteté. Ce que je pouvais apporter, je l'ai amené.»
Sa succession s'ouvre
Antonio Hodgers n’a pas consulté son parti avant de trancher. Mais il se dit confiant: «Le parti a tout à fait les forces, les capacités et les personnalités pour relever ce défi.» Il cite notamment Nicolas Walder et Maryam Yunus Ebener comme figures ayant «l’expérience aussi d’un exécutif communal, des personnalités dignes de la fonction.» Il balaye toute appréhension de vide après ses douze ans au pouvoir: «Il y aura d’autres forces, d’autres personnalités aptes à gouverner.»
Né à Buenos Aires, arrivé en Suisse comme réfugié à l’âge de huit ans, naturalisé à 14 ans, Antonio Hodgers exprime une profonde gratitude envers Genève: «On peut arriver comme un enfant qui ne parle pas français, sans papiers, et devenir président du Conseil d’État. C’est un énorme sentiment de reconnaissance.» Il cite l’école, la solidarité, l’Hospice général, et dit avoir «reçu l’accueil, l’entraide, les amitiés» mais surtout «l’honneur de servir à travers la politique.»
Pas d’avenir politique électoral
Il restera en fonction jusqu’à l’entrée en poste de son successeur, élu à l’automne prochain. Pour la suite, il reste discret: «J’ai bientôt 50 ans. Je ne vais pas me mettre à la retraite. J’ai des projets qui sont encore confidentiels.»
Il assure ne pas vouloir briguer de nouveau mandat électif, sans exclure un engagement futur dans la sphère publique. Et surtout, il souhaite se consacrer davantage à sa vie personnelle: «J’ai grandi sans père. C’est très important que mes enfants ne grandissent pas sans père non plus.»