Genève

Blanchiment: les termes d'un projet de loi font débat

12.07.2024 17h52 Julie Zaugg

projet de loi

La place financière suisse est cardinale pour notre économie, mais elle est aussi une proie pour le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme ou la corruption selon le Conseil fédéral. Il propose de renforcer le dispositif de contrôle en vigueur. Mais certains critères heurtent, notamment celui d'«origine raciale».

Ce renforcement se fait par le biais d’un projet de loi, désormais sur la table du Conseil des Etats. Il propose notamment l’introduction d’un registre fédéral de transparence, réservé au Département fédéral de justice et police, auprès duquel sociétés et personnes morales devront annoncer l’identité de leurs ayants droits économiques. Cela permettra aux autorités de poursuite pénale de déterminer plus rapidement et de façon plus fiable qui est derrière une structure juridique. 

Un passage fait tiquer, cependant, il s’agit de l’article 49 de ce projet de loi. Il stipule que si l’autorité de contrôle en fait la demande, la Confédération, le canton ou une commune peut lui communiquer certaines données dites sensibles. On parle alors de  données biométriques, sur des poursuites ou des sanctions pénales ou administratives, sur des mesures d’aide sociale; mais surtout des données sur les opinions ou les activités religieuses, philosophiques, politiques ou syndicales et enfin des données sur la santé, la sphère intime ou «l’origine raciale ou ethnique», lit-on dans le texte. 

Données et vie privée sous la loupe

Cela signifie que si l’autorité de contrôle se renseigne sur une procédure pénale ouverte en relation avec des faits de financement du terrorisme dont une organisation caritative ou religieuse est soupçonnée, elle pourra recevoir de ce fait des données sensibles sur les opinions religieuses ou politiques des personnes liées à cette organisation, y compris l’ayant droit économique.

Dans le cas des données sur la sphère intime et «l’origine raciale», l’autorité de contrôle pourra avoir accès à des données qui pourraient notamment indiquer les liens entre différentes personnes ou leur origine. Ce dans l’objectif par exemple de déterminer si l’actionnaire annoncé au registre de transparence agit en tant que prête-nom, s’il existe un pacte d’actionnaires ou un groupe familial derrière.

Si l'on comprend bien que le but est d’identifier qui sont les véritables propriétaires de biens, dans cette loi on reste dans la recherche de l’infraction économique. Se pose alors la question du lien avec l’origine ethnique ou « raciale » ou encore les pratiques religieuses. 

Réaction de Me Thierry Ullman, avocat spécialisé en droit pénal économique:

«Quand j'ai vu ce texte (...) j'ai pris contact avec mon parti et la commission fédérale contre le racisme. Personne ne m'a répondu... C'est un peu stressant!»