«C'est 12 personnes en moins, dans la rue, à dormir dans une allée»: immersion au Sleep-In du Quai 9
Afin d’apporter repos et dignité aux consommateurs de drogues, l’association Première ligne (Quai 9) a rouvert un hébergement de nuit depuis février dernier. En journée, la salle d'accueil du Quai 9 se transforme en Sleep-In dès la tombée de la nuit. Ce lieu a pour but de réduire les risques liés aux consommations de drogue dure, dont le crac, en hausse ces dernières années. L’occasion pour nous de s’immerger dans ce qui semble être un véritable toit pour ces usagers et usagères de la drogue.
Il est 20h15, ce centre d’accueil, situé à deux pas de la gare, ouvre ses portes et s’apprête à héberger jusqu’à 12 personnes. Ce soir-là, il affiche complet comme depuis plusieurs semaines. Sa mission: permettre aux consommateurs et consommatrices d’accéder à un logement, le temps d’une ou plusieurs nuits. L’opposé des conditions extrêmes de survie qu’impose la rue où s’installe fatigue et usure.
Un centre d'accueil qui se transforme de nuit
La journée, ce centre d’accueil se transforme en Sleep-In à la tombée de la nuit. Les toxicomanes préparent eux-mêmes leur lit. Un sac de couchage leur ai mis à disposition, ainsi que différentes couvertures, selon les températures. Une douche leur ai également mis à dispostion, ainsi qu'un sandwich selon les arrivages. Ce espace, modeste, a pour but de rendre aux consommateurs une dignité parfois bien entamée et les sortir de la stigmatisation.
La particularité de ce lieu de repos se situe au niveau de la consommation. Elle y est tolérée jusqu’à minuit pour les stimulants (cocaïne, speed,etc.) et une heure du matin pour les tranquillisants (héroïne, opiacés, etc.).
«Je trouve qu'on nous marginalise un peu trop facilement»
La soudaine et grande accessibilité du crack (cocaïne sous forme de cristaux que l'on peut fumer) à Genève a conduit à une diffusion rapide de son usage. En quelques années, l’établissement a été pris d’assaut. Selon Addiction Suisse, le nombre de passages en salle de consommation a quadruplé en trois ans, passant de 3'400 en 2019 contre 17'066 en 2022. Aménagé en 2019, le Sleep-In a cessé son activité pendant la pandémie de COVID-19. Selon le directeur, Thomas Herquel, «sa réouverture en février dernier devenait nécessaire». L’établissement comptabilise à ce jour plus de 1200 inscrits. Cependant, plusieurs questions se posent déjà, avec le déménagement du Quai 9, prévu avant 2026.
Ce lieu représente bien plus qu’une salle pour dormir. D'ailleurs, en journée, un suivi et un accompagnement peuvent être sollicités par les consommateurs et consommatrices. Avant d’être réveillés, à 6h du matin, les usagers auront besoin d’une bonne nuit de repos, car tout le monde le sait, le sommeil reste la meilleure des méditations.