Genève

Des parents dépités face à un DIP inflexible

06.04.2023 18h44 Julie Zaugg

famille Roxane, 6 ans, est atteinte d'un syndrome rare. Basile, 10 ans, a un trouble anxieux généralisé rendant difficile ses interactions.

Une famille domiciliée à Cartigny va devoir renoncer à son projet d’achat dans une commune voisine. En cause, une demande de dérogation refusée par le DIP : leurs enfants, même s’ils ont des besoins spéciaux et des difficultés majeures d’intégration, devront changer d’école s’ils déménagent. Impensable pour les parents… malgré leurs efforts c’est l’incompréhension. 

Cette famille de Cartigny se rêve propriétaire dans le village voisin. Mais ce projet de vie a une condition: que les deux enfants, atteints de divers troubles, poursuivent leur scolarité ici, et non à 3km. Roxane, 6 ans, est atteinte d’un syndrome rare impliquant des troubles moteurs, de développement et une dyspraxie. Elle bénéficie d’un accompagnement spécialisé en classe. Basile, 10 ans, a lui un lourd trouble anxieux généralisé, le rendant très craintif, rétif aux imprévus et rendant difficiles ses relations interpersonnelles. 

Après plusieurs années de scolarité épineuse, les enfants ont finalement un solide cercle de copains et d’adultes à qui faire confiance. Même en transposant l’accompagnement de la petite dans une nouvelle classe, comme garanti par le DIP, le changement d’environnement général serait source d’un stress immense. Et le couple le sent: en tant que parents, ce serait la goutte d'eau. « Nous ne sommes pas prêts émotionnellement, ce serai trop d'énergie pour aider nos enfants à changer d'école. Pas aujourd'hui du moins, pas maintenant. En tant que parents nous avons peur de ne pas tenir le coup » explique Daniel, le papa. 

Le DIP plaide l'intégration par l'école

Depuis plusieurs mois et après deux rendez-vous peu concluant, Daniel et son épouse échangent mails et courriers avec le DIP. En vain. Après avoir plaidé un potentiel sureffectif, le directeur des établissements en Champagne et la secrétaire générale de l’institution avancent la bonne intégration des enfants dans leur nouveau quartier, par le biais de l’école. «En effet, chaque quartier, chaque commune possède ses rituels, ses habitudes, ses fêtes propres, sa culture commune auxquels l'école contribue quotidiennement. Pour pouvoir s'intégrer dans un quartier/une commune il est indispensable de s'approprier et d'investir ces spécificités souvent développées au sein de l'école et de créer des liens avec les autres habitants. Pour les enfants, l'école est le lieu privilégié pour nouer ces liens et développer les compétences sociales en interaction avec les autres enfants», nous écrit le porte-parole du Département de l'Instruction Publique. 

Pourtant, les divers thérapeutes assurant le suivi des enfants appuient fortement la dérogation. Sans effets. Une situation que peine à comprendre Marjorie de Chastonay, présidente de la fédération genevoise des associations de personnes handicapées et de leurs proches. «Parfois il s'agit de tout reprendre à zéro! C'est très fatiguant pour la famille, les thérapeutes et désespérant pour les jeunes qui ont fait des efforts pour surmonter certaines barrières! Cela peu effectivement paraître insumrontable» regrette-t-elle. 

Pas de dérogation, pas de maison

Tellement insurmontable, que même si leur bail actuel se termine fin 2023, Daniel et sa femme comptent annuler leur achat. «Aujourd'hui c'est la tristesse, l'incompréhension mais aussi la colère qui prédominent», souffle Daniel. Et Marjorie de Chastonay de marteler: « C'est important d'écouter les familles et les réseaux qui gravitent autour de ces enfants. Mais surtout que le DIP ne fasse pas en fonction de son organisation au détriment du bien-être de l'enfant». 

D’après le règlement de l’enseignement primaire, la direction de l’établissement peut, à titre exceptionnel, accorder des dérogations de manière à permettre à l'élève de terminer l'année scolaire dans la classe où il l'a commencée. Il n’est pas fait mention du reste de la scolarité.