Jean-Baptiste Hêche, un pianiste de rue au Victoria Hall

«De la rue à la scène». C’est le nom du récital de piano qui sera donné le 15 janvier au Victoria Hall. Derrière le clavier, Jean-Baptiste Hêche, devenu pianiste de rue malgré lui. Sans-abris après un incendie, il a passé ces quinze dernières années à vivre de rencontres et de musique... Portrait.

Dans sa chambre d’hôtel lui servant de logement, nous rencontrons Jean-Baptiste Hêche, dit baptiste le pianiste. Vous l’avez peut-être croisé un jour, poussant son piano pour jouer dans la rue. Avant d’être SDF, ce jurassien d’origine était joailler sertisseur. Musicien depuis son enfance, il faisait aussi du piano dans un hôtel genevois et vivait dans son atelier situé à la Plaine. Puis en 1996, c’est le drame. 

«Le 15 avril, c'est l'incendie. J'ai tout perdu. Je n'avais plus rien et j'étais à l'époque pianiste au bar de l'hôtel Bristol», se souvient Jean-Baptiste Hêche. Un incendie ravage plusieurs bâtiments, dont son atelier. Il perd tout et est entraîné dans une spirale de précarité. Pianiste d’établissements en établissements, en échange du gîte ou du couvert, il se loge comme il peut, tantôt chez des amis, tantôt dans la rue. 

C’est un autre drame qui le poussera à jouer de son instrument sur les pavés genevois. Après le décès d’une amie, un petit concert est organisé dehors en son hommage. Il découvre alors les autorisations pour se produire légalement dans les rues. Quatre roulettes sous son piano plus tard … ainsi était lancé Baptiste le pianiste.  

Piano poussé sur les pavés

S’en suivent 13 ans à arpenter la ville en poussant le lourd instrument. Lequel a connu de nombreux environnements: de la place Bel Air au plongeoir du Bain des Pâquis…  mais aussi de nombreuses péripéties, comme la fois où un malotru a uriné dans son piano. 

«Dans la rue, il y a le meilleur comme le pire», nous dit Baptiste le pianiste. «Il y a des agressions... mais aussi de grands moments de joie. Des rencontres incroyables». Des anecdotes, il en a à la pelle. Mais le pianiste est pudique sur les détails de sa vie. Une chose est sûre, son talent attire les badauds, jusqu’à créer des collaborations spontanées et d’autres qui durent encore aujourd’hui et qu’il a souhaité mettre en lumière lors d’un concert.

Concert en l'honneur de Carrefour-Rue

Bénéficiaire de l’association Carrefour-Rue depuis 9 ans, Jean-Baptiste Hêche a souhaité remercier la fondation en organisant un récital à son profit. Via un sponsor, il a pu louer la salle pour une unique date. Dans quelques jours, il passera de sa chambre d’hôtel à la scène de l’emblématique salle de concert, accompagné d’artistes rencontrés ces dernières années, non sans émotion. 

Pour le président fondateur de Carrefour-Rue, cette mise en avant est vecteur d’espoir. «Il ne s'en pensait pas capable mais il l'a fait! C'est un cadeau qu'il peut faire à la population qui ne croit pas toujours que les personnes puissent s'en sortir», estime Noël Constant. 

Encore quelques jours pour répéter. Baptiste le pianiste et ses invités se produiront mercredi 15 janvier sous les dorures du Victoria Hall.