Genève

L'entrée en vigueur de la loi déchet est retardée à Genève

05.06.2023 16h36 Céline Argento

déchets

Obligation de trier ses déchets, interdiction du plastique à usage unique même dans les grands magasins, obligation pour les recycleurs d'incinérer les déchets à Genève: ce sont les grands axes de la nouvelle loi déchet votée en septembre dernier au parlement genevois. Mais plusieurs oppositions vont retarder sa mise en application.

On ne fouillera pas vos poubelles tout de suite. La nouvelle loi déchet, votée en septembre dernier au Grand Conseil, devait entrer en application en 2023. Mais ce sera finalement pour 2024, voire plus tard: «Malgré le fait qu’elle ait été votée à l’unanimité, ce qui est un magnifique signal du parlement, il y a des recours qui nous bloquent» se désole le conseiller d’État Antonio Hodgers. 

Un recours a été émis par la ville de Genève sur les éco-points. La loi prévoit que ces nouveaux lieux de collecte des déchets soient à une distance d’au moins 10 mètres des immeubles. La ville était contre, mais le recours a été rejeté. L’association Jardin suisse a aussi fait recours afin de pouvoir créer des tas de compost de moins de 100 tonnes sans autorisation, comme prévu par la loi fédérale. 

Contre l'interdiction du plastique à usage unique

Mais les principales oppositions se concentrent sur le coeur de la loi. D’abord sur l’interdiction du plastique à usage unique. Migros Genève, Coop, Manor, Denner, Migrolino se sont associés. Les distributeurs estiment qu’ils ont déjà mis en place des mesures, notamment sur la vente à emporter et pour les sacs en caisse. Ils disent ensemble leur opposition sur le plastique: «Les dispositions prévues dans la loi […] constituent, du point de vue du commerce de détail, une atteinte importante à la liberté économique. De plus, en raison d'une formulation ouverte de la loi, il n'est pas indiqué clairement quels produits d'assortiment sont concernés.» Sur ce point, le conseiller d’État estime que sa porte est ouverte pour en discuter: «On a des directives qui donnent le numéro du plastique qui sera autorisé et celui qui sera interdit. Donc pour moi, ce sont des prétextes. On a donné trois ans aux distributeurs pour se mettre en conformité parce que l’on sait que ce n’est pas simple. Ils pourraient nous appeler pour définir les plastiques autorisés ou interdits.»

Les distributeurs estiment également que c’est à la Confédération de légiférer et pas à Genève de le faire: «Le Conseil Fédéral est la seule instance habilitée à limiter les déchets à la source et à interdire les produits à usage unique». Antonio Hodgers juge cette position hypocrite: «Au niveau suisse, l’interdiction n’est pas encore prononcée mais à Genève il y a une loi alors faisons-le ! Si les grands distributeurs sont aussi sensibles à l’environnement qu’ils l’affirment dans toutes leurs campagnes d’affichage, alors qu’ils le mettent en application plutôt que de faire recours !»

Éviter le transport de déchets

Autre opposition, celle du recycleur Helvetia. La loi impose aux entreprises de tri de brûler les résidus de déchet à Genève. Helvetia veut pouvoir continuer à les brûler où elle veut, dans des endroits où l’incinération est moins chère, et ainsi garder une liberté économique. L’entreprise n’a pas souhaité répondre à notre micro. Les autres recycleurs eux sont favorables à la loi, comme le précise le président des Recycleurs de Genève Christophe Pradervand: « Il est important de travailler en économie circulaire. Nous avons une usine d’incinération ici. Il serait dommage de transporter des déchets à l’autre bout de la Suisse alors que nous avons tout ici. C’est aussi bien pour lisser le marché.»

La justice doit désormais se prononcer sur ces recours, mais la Confédération donnera aussi son avis. D’autant que cette dernière est favorable à la taxe au sac. La loi genevoise pourrait être retoquée en partie. Les décisions ne devraient pas intervenir avant plusieurs mois.