L'explosion de frontaliers ne va pas s'arrêter
À Genève, le nombre de frontaliers atteint des sommets historiques : 24'835 nouveaux titulaires du permis G en 2024, un chiffre record depuis les premières statistiques il y a 35 ans. Alors Genève doit-il, et peut-il, mieux réguler l’accès au marché du travail ? Deux élus fédéraux débattent.
Ils représentent 27 % de la population active à Genève. Les frontaliers, principalement venus de Haute-Savoie et de l’Ain, sont plus nombreux que jamais. Et c’est l’Office cantonal de la statistique qui le dit : 24’835 nouveaux permis G en 2024. Ce nombre est en augmentation constante depuis le début des statistiques en 1989.
Que fait la politique?
Mauro Poggia, élu en 2018 en faisant campagne précisément sur la préférence cantonale, regarde ces chiffres avec regret. Selon lui, ses efforts auprès des faitières pour "engager local" ont été stoppés après son départ en 2021. Les autorités cantonales sont désormais trop passives. « Aujourd’hui, il y a des garde-fous pour le secteur public, mais dans le secteur privé, aucune protection ne peut être mis en place sans l’accord des intéressés. On voit qu’il n’y a pas de volonté politique ni à gauche ni à droite pour réguler cette situation. »
Autre analyse à gauche. Pour Christian Dandrès, le problème vient surtout des bas salaires et du manque de conventions collectives de travail dans certains secteurs.
« La possibilité de défendre des conventions collectives de travail et de négocier son salaire sans perdre son emploi, ce sont les éléments de base » assure l’élu socialiste à la chambre basse fédérale. « Le coût de la vie à Genève est très élevé. Avec un salaire à 4 400 CHF par mois, un loyer à 2500 CHF et des primes d’assurance-maladie, et bien, tout simplement, vous ne pouvez pas vivre ici. »
Tous les secteurs engagent des frontaliers
En regardant de plus près les chiffres, 4 secteurs en manque de main-d'œuvre sont concernés par les nouveaux permis. Restauration (1 917 nouveaux permis), santé et action sociale (1 891), commerce de détail (1 635) et construction (1 258). Avec les agences de placement qui recrutent dans divers secteurs, ces engagements englobent un peu moins de la moitié des nouveaux frontaliers.
Les autres se répartissent donc dans tous les secteurs. Dont une part importante pour le travail de bureau, notamment (3751). Comment réagissent nos élus à ces chiffres? Pour Christian Dandrès «au final, ce sont les employeurs qui décident. Il y a donc peut-être un travail à faire auprès des employeurs. C’est une question de civisme et de solidarité. » Mauro Poggia lui ne se dit pas étonné « On a tous des exemples autour de nous, où le chef direct propose quelqu’un de sa région. En fait, on n'a pas cherché ni auprès de l’Office cantonal de l’emploi ni en mettant des annonces. »
Genève premier canton loin devant
Genève est de loin le premier canton pour le nombre de frontaliers total, et celui où le recours à cette à main-d'œuvre augmente le plus. Il y a été multiplié par 3 depuis 2002. Par comparaison, au Tessin il a doublé et à Bâle-Ville, les chiffres sont restés stables depuis 20 ans.