Genève

La plaignante dit avoir cru mourir sous les coups de Tariq Ramadan

16.05.2023 13h52 Julie Zaugg avec ATS

Brigitte* a confirmé mardi devant le Tribunal correctionnel de Genève avoir bien été violée par l'islamologue Tariq Ramadan, une nuit d'octobre 2008, dans la chambre d'un hôtel genevois. Elle a affirmé avoir eu peur de mourir sous les coups du théologien.

Cette journée était attendue, car marquée par la présence d’une personnalité publique en guise de témoin. Il s’agissait de l’humoriste controversé Dieudonné M’bala M’bala. Il a été convoqué par le tribunal pour témoigner. Mais avant qu’il n’entre dans la salle, la plaignante a été interrogée sur ses liens avec l’humoriste.

Elle a alors expliqué qu’elle avait des liens «de camaraderie» avec Dieudonné, des liens aussi professionnels puisqu’elle était agent artistique et avait participé à la promotion de plusieurs de ses spectacles. Elle a aussi mentionné qu’il savait, ce qui lui était arrivé, car il lui aurait demandé un jour si l’histoire avec Tariq Ramadan est vraie. «J’ai eu l’impression qu’il avait les larmes aux yeux et donc implicitement j’ai fait le lien avec le viol que j’ai subi. J’ai juste confirmé par un Oui», a-t-elle répondue. C’est donc avec cette image en tête que la Cour et la salle de ce tribunal a accueilli Dieudonné à la barre.

Mais là, Retournement de situation, son récit est venu bousculer la version de la plaignante, voire même la discréditer. Non, il n’était pas au courant d’une agression de la sorte, il a juste entendu lors d'une discussion mentionnée une liaison, qui aurait été alors qualifiée de Coup d’un soir par Brigitte elle-même. Plus encore, il explique qu’il a bien connu la plaignante et avait de bons rapports avec elle mais qu’il ne croit pas un instant que Tariq Ramadan ait pu commettre les actes qu’on lui reproche. 

La plaignante décrit «une nuit épouvantable»

À la suite de l’audition de l’humoriste, «Brigitte» a présenté son témoignage durant près de 6 heures. Elle a raconté ce qu’elle qualifie comme son calvaire. Une nuit épouvantable, où elle aurait été rouée de coups, violée à plusieurs reprises et presque étouffée par une fellation imposée violemment. «Je me suis vue mourir» disait-elle. Elle pense avoir été tabassée parce que Tariq Ramadan la soupçonnait d’être des Renseignements Généraux.

Pourtant, comme le relèvent les avocats de la défense, cette nuit n’a laissé aucune trace. Pas de plaie, d’ecchymose, de vêtement déchiré et conservé. Les seuls petits restes de cette soirée qu’aurait gardés la plaignante, ce sont, dit-elle, ses mèches, ces extensions de cheveux touchés par l’islamologue, qu’elle a rangé dans un petit coffre avec ses accessoires capillaires. Pourquoi n’a-t-elle pas conservé plus? «Je n’avais pas l’intention de lui nuire, pendant longtemps j’ai même culpabilisé. Culpabilisé d’avoir voulu cette rencontre, peut-être provoqué la situation et ensuite de ne pas l’avoir convaincu que je n’étais pas des RG».

Mais elle explique ensuite que tout ça c’était avant, avant de tomber sur des blogs qui faisaient mention d’agressions sexuelles commises par le prévenu. C’est à ce moment-là qu’elle elle s’est décidée à parler. L’émotion s’est emparée d’elle à quelques reprises. Brigitte souhaite désormais tirer un trait sur cette histoire et être reconnue comme victime. Sauf que là est tout le problème: sa version des faits ne semble pas convaincre la Cour.

Ses explications sont floues, peu précises, contradictoires voire confondantes. Les avocats de la défense, le président et les juges la piquent de leurs questions. Tout comme ils piquent et coupent régulièrement les avocats de la partie plaignante. Des témoins de moralité sont encore entendu ce mardi soir, ainsi que le réquisitoire du premier procureur. Demain la journée entière sera dédiée aux plaidoiries.