Genève

«La révolution des œillets a 50 ans...»

25.04.2024 19h19 Denis PALMA

.

 À Genève, 33 000 Portugais vont célébrer la révolution des œillets qui a fait basculer leur pays dans le camp des régimes démocratiques. Mais vous connaissez surement moins l’histoire des exilés portugais persécutés par la police politique de Salazar qui se sont réfugiés à Genève avant la révolution. Dans un livre, le journaliste Jean-Jacques Fontaine raconte leur histoire. Rencontre.   

Il y a 50 ans, à 4 heures du matin, la chanson «Grândola Vila Morena» de Zeca Afonso est diffusée sur les ondes d’une radio portugaise. C’est le signale adressé aux militaires pour lancer un coup d’État. Le 25 avril 1974, après 48 ans de dictature, le régime de Salazar tombe pratiquement sans effusion de sang. C’est le début de la révolution des œillets mené par des militaires progressistes qui refusaient de poursuivre des guerres coloniales. Ils sont soutenus par tout un peuple.  

Avant la révolution, dans les années 60, Genève a accueilli un mouvement de réfugiés politiques qui avaient fui la dictature salazariste. Dans son livre, Jean-Jacques fontaine évoque le rôle de certains genevois qui les ont aidés à franchir la frontière afin de rejoindre Genève. «L’une des filières passait par la région de Jussy. Parmi les Suisses qui ont aidé les Portugais à entrer, il y en a une très connue qui s’appelle Ruth Dreifuss et qui deviendra ensuite Conseillère fédérale, mais qui à ce moment-là a participé à l’exfiltration de France vers la Suisse d’exilés portugais», raconte l’ancien journaliste.      

Une quarantaine d'opposants déserteurs de l'armée portugaise 

Ces opposants, une quarantaine, dont la plupart sont des étudiants de gauche ont déserté l’armée car ils refusaient de participer aux guerres coloniales. Deux d’entre eux ont marqué l’histoire de Genève. «Le premier est Antonio Baretto qui deviendra ministre après le 25 d’avril. Il est l’un des  fondateurs du journal d’extrême gauche genevois «Tout va bien».  Le Second est Eurico Figereido: il a terminé ses études de psychiatrie à Lausanne et vient ouvrir à Genève avec un autre réfugié politique espagnol à Genève le premier centre de jour qui permet de sortir les malades psychiatriques de l’hôpital de bel air. Lorsque Figereido rentre au Portugal en 1974, il va avoir un rôle déterminant à partir du modèle suisse, dans la décriminalisation de l’usage de la drogue au Portugal qui fait aujourd’hui de ce pays un exemple dans le domaine.»    

Les réunions des réfugiés politiques au Café Landolt

Ces réfugiés politiques portugais avaient leurs habitudes dans un lieu mythique, le Café Landolt, installé à l’angle de la rue de Candolle. Sur les murs du bâtiment, une plaque commémorative immortalise cette période: «La brasserie Landolt à abriter avait la révolution des œillets du 25 avril 1974 des réunions des réfugiés politiques.»  

Le coup d’État avorté du général Spinola

Enfin, dans son livre, Jean-Jacques Fontaine nous livre une succulente anecdote: en 1976, le premier président de la République portugaise après la révolution, le général Spinola, est réfugié à Genève après s’être distancié du mouvement révolutionnaire. Il y fomente un coup d’État au Portugal. Mais il a été démasqué puis expulsé de Suisse.