Genève

Le père de Delphine Bachmann nommé par le Conseil d’État à un très haut poste

13.03.2024 14h50 Jérémy Seydoux, Lucie Hainaut

SCHWEIZ GENF STAATSRAT MINIMALLOHN

Le Conseil d’État a nommé le père de Delphine Bachmann, également beau-frère de Nathalie Fontanet, au poste de directeur général de l’OCSIN, l’office en charge des questions informatiques du canton. Alain Bachmann succède à Éric Favre, promu il y a huit mois secrétaire général au département… de Delphine Bachmann. Selon Léman Bleu, Anne Hiltpold s'est opposée à cette nomination.

Après cinq mois sans patron, l’OCSIN, rattaché au département des Institutions et du numérique de Carole-Anne Kast, tient enfin son nouveau chef. Le Conseil d’État a arrêté ce jour la nomination d’Alain Bachmann au poste de directeur général de cet office qui emploie 600 collaborateurs. L’homme de 60 ans était jusqu’à présent directeur d’un service rattaché.

Sa promotion fait suite au départ d’Éric Favre, lui-même engagé par Delphine Bachmann pour diriger le département de l’économie et de l’emploi (DEE). 

Dans son communiqué hebdomadaire, le Conseil d’État souligne «sa riche expérience de manager au sein de l'État». Monsieur Bachmann a débuté sa carrière à l'État de Genève en 1992 en tant qu'ingénieur informatique. Sa candidature a été retenue parmi une trentaine de prétendants internes et externes.

Lien hiérarchique direct 

Le hic, Alain Bachmann est le père de la conseillère d’État Delphine Bachmann et est le beau-frère de la magistrate Nathalie Fontanet (via son ex-époux), en charge notamment du personnel de l’État. Selon le règlement de l’administration, le poste de directeur général ainsi que celui de secrétaire général sont sous l’autorité du Conseil d’État dans son ensemble, et non d’un département en particulier.

Le haut fonctionnaire a donc un lien hiérarchique direct avec un collège composé de sa fille et de sa belle-soeur. Normal? Oui, selon la loi, qui ne prévoit pas d’incompatibilité. 

Comment l’exécutif compte-t-il gérer ces liens familiaux au quotidien? «Sans problème», indique Laurent Paoliello, porte-parole du département des institutions et du numérique (DIN). «Le directeur général de l'OCSIN répond hiérarchiquement uniquement à Madame Kast, pas à un autre conseiller d'Etat. C'est l'engagement qui est de l'autorité du Conseil d'État.»

Précisons que dans ce nouveau rôle, Alain Bachmann est susceptible de défendre des enveloppes budgétaires devant le gouvernement, parfois aux côtés de sa belle-soeur devant la commission des finances. Il répondra aussi devant le Conseil d’État et ses membres de questions spécifiques concernant son office. Par ailleurs, Delphine Bachmann et Nathalie Fontanet font partie de la délégation gouvernementale aux questions numériques.

«Il y a un risque évident de potentiels conflits d’intérêts» – Thomas Wenger, président du parti socialiste

La nouvelle surprend le président du parti socialiste Thomas Wenger: «Je suis surpris par cette nomination. Non pas sur la base des compétences de Monsieur Bachmann mais sur ses liens familiaux directs avec Delphine Bachmann et indirects avec Nathalie Fontanet, toutes deux membres de la délégation du Conseil d’Etat à la transition numérique. Il y a un risque évident de potentiels conflits d’intérêts.»

Anne Hiltpold a dit non

Conflits d'intérêts, voire népotisme? Laurent Paoliello, porte-parole du département du DIN, balaie d'emblée les critiques: «Monsieur Bachmann ne fait pas partie de la famille de Madame Kast ni même de sa famille politique. Dans le cas d'espèce, considérer qu'il s'agit de népotisme est totalement erroné.»

Reste qu'au sein du Conseil d'État, cette décision divise. Selon nos informations, la ministre PLR Anne Hiltpold, s'est opposée à cette nomination. 

Demeure enfin la question de l’image institutionnelle, déjà abîmée dans l’affaire des largesses accordées par l’ex-ministre Fabienne Fischer à ses proches et l’ingérence de son compagnon dans les affaires du département. Autre polémique, révélée par Blick, touchant l’ex-conseiller d’État Serge Dal Busco qui avait engagé son beau-fils comme collaborateur personnel.

En la matière, d’autres avaient choisi de soigner les apparences, à l’instar du mari d’Anne Emery-Torracinta, qui avait quitté son poste de directeur de collège lors de l’élection de son épouse.