Les déboires du PLR Thônex avec l’IA
Les déboires du PLR Thônex avec l'IA
Lundi, une affiche générée par une intelligence artificielle pour le compte du PLR Thônex a créé la polémique. Le personnel politique n’est pas toujours conscient des biais de ces outils technologiques s’ils sont mal maîtrisés.
L’intelligence artificielle joue des tours pendables aux politiciens. Le PLR Thônex en a fait l’amère expérience ce lundi. Voulant générer une affiche de campagne pour les élections municipales, il a publié un dessin d’un quartier où figuraient trois femmes voilées, ce qui n’était sans doute pas son intention première. Aussitôt, la Toile s’est enflammée et le parti bourgeois a rapidement corrigé le tir en remplaçant cette image par une autre.
«L’objectif n’était pas de faire un visuel qui communiquait quelque chose de particulier, explique le président du PLR genevois, Pierre Nicollier. C’était d’avoir une illustration. Il était normal de la changer, pour que les citoyens puissent se concentrer sur le message.»
Comment cela s’est-il produit? Contactée, la présidence du PLR Thônex refuse de s’exprimer. Mais selon nos informations, le parti a donné la consigne à l’IA de créer une image représentant la diversité. Les vérifications ont été sommaires, s’attachant à contrôler le contenu du message et les éventuelles fautes d’orthographe.
«Dans un dialogue humain, le concepteur aurait dit que ça ne jouait pas»
Boris Calame, candidat vert'libéral au Conseil administratif de la Ville de Genève, met en garde: «Dans la communication, il y a toujours un demandeur et un concepteur. Dans ce cas, on se rend compte que le concepteur n’a pas le regard critique, on lui donne des paramètres et elle produit quelque chose. Le commanditaire, lui, n’a pas eu le regard sur la réalité de son visuel, il a trouvé simplement joli. Sans doute que les mots clés n’étaient pas les bons. Mais dans un dialogue humain, le concepteur aurait dit que ça ne jouait pas.»
Un socialiste sur un tas d'or devient un enfant chinois sur un tas de sous
L’IA est fréquemment utilisée dans les campagnes politiques, avec des résultats plus ou moins heureux. Adepte de cette technologie, Pierre Nicollier en connaît les failles. Il conserve d’ailleurs des images totalement farfelues et inutilisables. Dans le cadre de la campagne pour la baisse d’impôt du mois de novembre, il avait demandé à une IA de créer un visuel d’un socialiste pleurant sur un tas d’or. L’image produite par l’IA représente un enfant chinois sur un tas de sous. «On peut voir que l’IA a été biaisée», résume-t-il.
Mais un autre danger guette les partis qui bricolent avec l’IA: être accusés de désinformation. Pour les élections fédérales de 2023, une affiche du PLR représentant des militants pro-climat, les mains collées sur le bitume, avait provoqué l’ire de ses adversaires, l’accusant de désinformation. Depuis, le parti bourgeois mentionne l’origine de ses images, pour lever le doute sur la désinformation.
«Il n’y a pas de bouton magique»
Dans le cas de Thônex, le PLR s’est tiré une balle dans le pied. Après l’affaire du burkini, cette image ajoute une nouvelle ambiguïté. Mais cela s'explique, selon Grégoire Barbey, journaliste au Temps spécialiste de l'IA: «Les éditeurs qui commercialisent ces logiciels essaient de proposer des éléments inclusifs, du moins c’est présenté comme tel. Cela peut conduire à mettre en avant des éléments qu’on n’attendait pas en voulant créer une image. Il n’y a pas de bouton magique, et c’est peut-être l’erreur qu’a faite le PLR Thônex en pensant accélérer sa production plutôt que prendre le temps de créer la bonne image pour la bonne campagne.»
Le regard humain reste essentiel dans l’utilisation de ces nouvelles technologies, surtout en matière de communication politique. Gare aux contrefaçons.