Genève

Nomination controversée: «L'État est à côté de ses pompes»

15.03.2024 19h13 Denis PALMA

SCHWEIZ GENF STAATSRAT MINIMALLOHN

Après la nomination controversée du père de Delphine Bachmann à la tête de l’OCSIN, les explications de la conseillère d’État Carole-Anne Kast ne passent pas. Alors que certains fustigent la ligne de défense légaliste de la socialiste, d’autres dénoncent une ministre hautaine coupée des réalités du peuple. 

Carole-Anne Kast est descendue jeudi soir de la tour Baudet pour éteindre le feu d’une polémique qui, selon la socialiste, n’a aucun fondement. La nomination d’Alain Bachmann, père de Delphine Bachmann, lié aussi indirectement à la famille de Nathalie Fontanet, à la tête de l’OCSIN est conforme en tout point à la loi, a-t-elle expliqué. «Il y a les règles de récusation qui ont été respectées mais aussi celles de devoir choisir la compétence de choix pour tous les postes de l’administration. Et c’est ce que le Conseil d’État a fait.»

Des explications qui n’ont pas convaincu le député UDC Yves Niddegger: «Le problème de cette interview c’est que madame Kast incarne un État complètement à côté de ses pompes. Car avec un ton donneur de leçons aux journalistes et aux députés et à toute la République, elle oublie ce que les téléspectateurs vont ressentir. L’exercice est raté», affirme l’ancien conseiller national.

«L’État a commis une faute politique»

Cette interview n’a pas manqué de faire réagir sur les réseaux sociaux. Cyril Aellen y bat en brèche la position du gouvernement. «Contrairement à ce que dit Mme Carole-Anne Kast, le Conseil d’Etat dispose d’un pouvoir d’appréciation dans un cadre légal donné. Il ne se borne pas à appliquer une loi de façon mathématique ou scientifique. Et là, il a très clairement mal apprécié la situation. Il n’a pas commis une erreur juridique mais une faute politique. Le peuple est donc légitimement mécontent», écrit le conseiller national PLR.

«Il pourrait avoir l’oreille de certaines conseillères d’État»

Une interview qui fait réagir jusqu’à l’extrême gauche de l’échiquier politique. «Dire aujourd’hui qu’il n’y pas de problème car la loi est appliquée, c’est juste méconnaître les règles de bonne gouvernance qui veulent que l’on doit mettre tout le monde dans de bonnes conditions de travail pour qu’il y ait la moindre suspicion de collusion, de conflits d’intérêts ou de népotisme, argumente Jocelyne Haller (SolidaritéS). Car non seulement cela porte atteinte à la personne mais aussi aux autres collaborateurs qui doivent travailler avec elle. Ils pourraient penser que cette personne est en position de force car elle a l’oreille de certaines conseillères d’État», conclut la syndicaliste.

Interrogée sur le positionnement de Thomas Wenger à cette nomination, Carole-Anne Kast s’en est aussi prise à son président de parti: «Ce n’est un secret pour personne au sein du parti que je ne soutiens pas la candidature de Thomas Wenger à la présidence du Parti socialiste. Il a voulu régler ses comptes.» Contacté, le président du PS genevois n’a pas souhaité commenter. Mais son collègue de parti Alberto Velasco évoque une attaque complètement hors sujet. «Cette position de madame Kast en tant que conseillère d’État n’a pas lieu d’être, estime le député PS Alberto Velasco. Comme militant du parti socialiste, elle dit ce qu’elle veut mais elle n’a pas à censurer le président du parti sur des propos qu’il a le droit de tenir. C’est délicat quand même.»

La promotion d’Alain Bachmann à la tête de l’OCSIN l’installe en classe 31 dans l’échelle de traitement des fonctionnaires de l’État de Genève, soit jusqu'à 240'000 francs par an. Aujourd’hui âgé de 60 ans, cette promotion lui offrira dans 5 ans une retraite confortable basée sur une primauté des prestations, puisque sa rente sera calculée sur ses derniers salaires.