Genève

Prison à vie requise contre le tueur d'une prostituée

29.11.2023 18h53 Julie Zaugg

Le Ministère public genevois a requis mercredi la prison à vie à l'encontre de l'homme de 43 ans jugé depuis lundi par le Tribunal criminel de Genève pour le meurtre d'une escort-girl, en 2019, à Genève. L'internement du prévenu a aussi été demandé.

Le procureur Frédéric Scheidegger semble avoir entendu les parties plaignantes hier et ce réquisitoire fait écho à leur demande: que le prévenu ne puisse plus jamais faire de mal à personne. Durant son réquisitoire, le Ministère public a clairement tourné au ridicule la version du prévenu sur les faits. Il pointe «l’aspect surréaliste de son récit». Il rappelle le lourd CV criminel de celui-ci depuis 20 ans maintenant et que les experts estiment que le prévenu a des «traits narcissiques et psychopathiques prononcés». Le risque de récidive est élevé, les mesures ambulatoires vouées à l’échec.

Pour lui, les preuves sont trop incriminantes et impossibles à justifier, malgré les gesticulations et les efforts du prévenu pour détourner les soupçons. Ses versions sont trop extravagantes. Il demande ainsi à retenir l’assassinat, vu notamment le manque de scrupules, la préméditation et les circonstances atroces du décès de Marlène.

Le complice auditionné

Ce n’est pas commun d’utiliser la visioconférence, or c’est la deuxième fois en deux jours. Là ce fut audition brève mais intense dira-t-on, nous avons pu entendre en effet Soheil Sabet, le complice condamné en France à 13 ans de réclusion pour ces même faits. 

Il a 21 ans maintenant et était en visioconférence depuis un parloir de la prison de Roanne dans la Loire. Très vite, il a expliqué à la présidente du tribunal qui voulait l’interroger qu’il ne souhaitait pas être ici, qu’on l’y avait forcé et qu’il ratait un examen à cause de cette convocation. Quand la présidente lui a fait remarquer qu’il serait peut-être intéressé de savoir que le prévenu Suisse le charge lui pour ce meurtre, il a juste eu un regard pour la caméra, a lâché: «Tranquille, tu sais, on le connaît le mythomane». Puis il a prévenu qu’il allait y aller, puis s’est levé et a quitté le parloir. 

Impossible d’obtenir plus de ce témoin à moins d’utiliser la force et des attaches pour les agents pénitenciers en France. La présidente n’y tenant pas, la visioconférence a été coupée. Le tribunal est donc resté là-dessus, à savoir que les déclarations de ce jeune homme sont considérées comme beaucoup plus crédibles que celle du prévenu suisse par le ministère public et les avocats des parties plaignantes.

Un «professionnel» du brigandage

Selon l’avocate du compagnon de Marlène, Me Coognard-Drai «tout accuse et rien n’excuse le prévenu». Elle a dénoncé son impertinence et son côté manipulateur, l’a décrit comme un «professionnel» du brigandage, perfide, sournois, calculateur. Qui n’a jamais modifié son plan, reculant devant rien, pas même devoir plier un corps dans une valise. Flirtant sur Tinder dès le lendemain des faits. 

Cette froideur et cette maîtrise de lui, elle est relevée aussi par l’avocat des petites-cousines de Marlène, Me Grodecki. Des proches qui sont ici aujourd’hui pour comprendre et pour réclamer justice, mais d’une manière particulière. Elles demandent en effet que les éventuelles indemnités pour tort moral soient reversées à l’association de défense des droits des travailleuses et travailleurs du sexe, Aspasie. Demain place à La défense.