Procès Sperisen: l’accusé demande 6 millions de francs de réparation
Deuxième jour du procès d’Erwin Sperisen, accusé de complicité dans l’exécution de sept détenus d’une prison guatémaltèque en 2006. Devant la Cour, l’ancien chef de la police civile n’a pas souhaité revenir sur les faits.
Ce mardi, les avocats d’Erwin Sperisen ont demandé 6 millions de francs de réparation pour leur client. Un montant à la hauteur du tort subi: 12 ans de procédures, trois condamnations pour trois histoires différentes, a rappelé Me Giorgio Campa. Ce qu’«Erwin Sperisen demande, dit l’avocat au tribunal, c’est un jugement de réparation, c’est la révocation d’une erreur judiciaire.» Le tout en s’appuyant sur leur argument massue: «notre client ne peut pas être condamné pour être le complice d’une personne innocentée par la justice, en l’occurrence autrichienne.»
La défense a ensuite soulevé un problème de procédure, un problème de forme: l’acte d’accusation ne permettrait pas de condamner Erwin Sperisen. «De l’acte d’accusation initial, qui date de 2014, il ne reste plus rien, commente Me Giorgio Campa je rappelle que le Ministère public prétendait accuser Erwin Sperisen d’avoir été membre d’une organisation criminelle ayant planifié et mis en œuvre des exécutions extrajudiciaires. On reprochait à Erwin Sperisen d’avoir participé à l’une d’elles. Toutes ces accusations ont été balayées. Elles n’existent plus, on a dû se rabattre sur une prétendue complicité qui n’apparait nulle part dans l’acte d’accusation.»
Autre point important sur lequel a bataillé la défense, la présumée appartenance de l’ancien chef de la police civile du Guatemala à une organisation criminelle. Me Florian Baier rappelle que le Tribunal fédéral a expliqué dans un arrêt de 2017 qu’il y a «deux éléments relativement minces» pour retenir une participation. «Un de ces deux éléments a fait l’objet d’un classement et le second n’a pas pu être démontré par la justice genevoise.»
«Je suis épuisé»
Puis, l’accusé a été auditionné. La présidente de la Cour a bien pris le temps de donner la parole à l’ancien chef de la police pour lui demander comment ce dernier allait dans sa vie. Réponse d’Erwin Sperisen : «C’est un peu compliqué. J’ai passé de nombreuses années en prison après avoir été condamné par des personnes qui n’ont jamais mis les pieds au Guatemala et qui ne connaissent pas ce pays, a-t-il expliqué en espagnol. Cela fait 12 ans que mes déclarations sont cohérentes. Je suis épuisé, ça fait 12 ans que je répète la même chose.»
Sur les faits, il refuse de répondre aux questions de la Cour. «Je me réfère à mes déclarations antérieures». En clair: tout a déjà été dit. Quelques rangs derrière lui, sa femme est émue aux larmes. Pour elle, ces 12 années ont été très difficiles à vivre. «Il n’était pas à la maison, c’était moi qui avais la charge des enfants. Pendant sept ans, je n’avais pas de travail, j’étais loin de mon pays et de ma famille. C’était vraiment compliqué de donner de l’espoir à Erwin depuis sa prison et en même aux enfants, tout en les rassurant.»
Plus tôt dans la matinée, toutes les questions préjudicielles soulevées par la défense, soigneusement étudiées par la Cour, ont été balayées. Mercredi sera probablement le dernier jour de procès avec le réquisitoire du 1er procureur Yves Bertossa.