Prostituée violée en 2018: ouverture d'une procédure pénale
Dans l’affaire de l’agression présumée d’une prostituée par un policier en congé, le Ministère Public ouvre une procédure pénale. Cette décision fait suite au reportage de la RTS diffusé ce dimanche 3 septembre qui relate le témoignage de la travailleuse du sexe.
Lumière va enfin pouvoir être faite sur ce qui s’est réellement passé, plusieurs versions contradictoires des faits circulent. Des questions restent aussi en suspens. La somme d’argent que le policier lui aurait tendue lors de cette confrontation, servait-elle à acheter son silence ou pour régler maladroitement à postériori une prestation? Sachant que si la contrainte ou l’agression est retenue, on ne peut plus parler de prestation.
La travailleuse du sexe compte-t-elle vraiment porter plainte, ou non? Peu importe, finalement. Les faits se sont déroulés il y a cinq ans. La prescription étant fixée à 15 ans pour les cas de contraintes sexuelles, cette femme avait encore dix ans pour saisir la justice. Mais puisque le mot viol a été clairement énoncé par la prostituée dans le reportage du 19h30 du dimanche 3 septembre, c’est poursuivi d’office, sans équivoque.
Il est indiqué dans le communiqué que le procureur général dirigera cette procédure. Les investigations policières seront elles confiées à trois policiers de l’IGS, la police des polices, étant précisés qu’ils sont tous issus de la police judiciaire et ont rejoint l’IGS bien après les faits. Contactée par Léman Bleu, la police genevoise, indique finalement que l’enquête interne qui était en cours est suspendue pour le moment afin de laisser place à cette procédure.
La main courante modifiée
L’absence de rapport est rare. Selon le code de procédure pénale (article 307), il y a conditions pour qu’il ne soit pas rédigé. Si le Ministère public estime qu’il n’y a pas matière à d’autres actes de procédure -Or il n’aurait pas été averti ce soir-là- et lorsque la culpabilité d’une personne interpellée a été exclue. Ce n’est pas non plus notre cas, puisque manifestement personne n’a été interpellé.
L’autre élément troublant et qui constituerait un fait grave c’est la modification de la main courante. La main courante c’est le document rempli par la police pour consigner le détail des faits, la date, etc.
La RTS dit avoir constaté qu’elle était lacunaire et explique que le policier en charge de la rédiger a été «contraint de supprimer des passages sensibles». Ce n’est évidemment pas permis.
Pourtant des accusations graves sont l’objet de cette affaire et tout est question de qualification des actes. Contrainte ou contrainte sexuelle? La différence entre les deux réside dans le fait que la contrainte sexuelle est poursuivie d’office. La contrainte seule, non. Se pose la question de ce qui a été retenu par la police le soir des faits. Cela expliquerait l’inaction par la suite.
Confrontée à son agresseur présumé
Retour sur les faits, nous sommes en avril 2018, Un homme fait monter une travailleuse du sexe dans sa voiture. Il l’aurait ensuite agressé sexuellement et séquestrée. Elle parvient à fuir et note sa plaque d’immatriculation. Lorsqu'elle est prise en charge par une patrouille et que les recherches commencent. Il s’agit d’un policier en congé. Un commissaire et l’IGS, la police des polices sont informés de la situation et seraient rendus au vieil Hôtel de Police avec la jeune femme. Sur place, elle serait retrouvée confrontée à eux mais aussi à son agresseur présumé.
De l’argent lui aurait été proposé, entre 200 et 500 francs. Elle refuse. Le commissaire insiste. De cette rencontre à l’Hôtel de Police, il resterait une main courante lacunaire, avec plusieurs passages de cette scène non mentionnés. Le procureur de permanence n’a pas été informé ce soir-là, contrairement à ce que veut la procédure. Le Procureur Général a, lui, été tenu au courant plus tard via l’IGS, la police des polices estime alors qu’une enquête ne se justifie pas. Il en prend acte.
Retour de la prostituée?
Le lendemain des faits, la prostituée s’est confiée à l’Aspasie, l’association genevoise pour la défense des droits des travailleuses et travailleurs du sexe. Très choquée, cassée. Elle quitte la Suisse. Mais elle pourrait bien revenir pour donner suite à cette affaire.
Le pôle enquête de la RTS le révélait hier soir, cette dernière ne compte pas en rester là. Après avoir retrouvé la trace de cette jeune femme, la RTS a pu recueillir son témoignage par téléphone. Grâce à la médiatisation de son histoire, elle se dit désormais prêt à affronter l’homme qui l’a agressée et qui exerce toujours au sein de la police.
L’adjoint de la commandante Monica Bonfanti a été chargé de faire la lumière dans cette affaire. Un rapport sera rendu à la conseillère d’Etat en charge de la sécurité, Carole-Anne Kast.