Genève

L'ex-enseignant n'est pas un prédateur sexuel, selon son avocate

11.09.2023 18h33 Rédaction / ATS

Le procès d'un ex-enseignant accusé d'avoir contraint des adolescents à des actes sexuels s'est poursuivi lundi devant le Tribunal correctionnel de Genève. Pour son avocate, qui a plaidé l'acquittement, il n'est pas ce prédateur froid et calculateur décrit par l'accusation.

"Mon client n'est ni un pédophile ni un violeur. Il a perçu des demandes, des relances", a indiqué Laïla Batou. Et l'avocate de dénoncer une instruction biaisée par une erreur de datation qui a d'abord placé la période pénale en 2016, quand les deux plaignants n'étaient tout juste pas majeurs sexuellement. Or les faits ont commencé à l'été 2017.

Pour l'avocate, les deux adolescents ont montré "un empressement extrême, une curiosité pour la sexualité homosexuelle et la drogue". Ils sont allés quotidiennement voir l'enseignant, alors âgé de 37 ans, après l'avoir croisé par hasard et lui avoir demandé de pouvoir utiliser son ordinateur. "Il y a vu une forme d'avance", relève-t-elle, excluant la thèse de l'araignée tissant sa toile.

MDMA, ecstasy, Viagra, sexe, tout s'est passé progressivement, signe que le prévenu faisait attention à leur consentement. L'avocate exclut la pression et la contrainte. Selon elle, l'un des jeunes a participé par désir ou par peur d'être à l'écart. L'autre, avec qui les rapports ont duré trois ans, parce qu'il a des pulsions pour les hommes et ne pouvait les vivre que sous l'effet de la drogue.

"Réécrire son histoire"

Dans la matinée, le Ministère public a requis six ans de prison à l'encontre de l'ex-enseignant et l'interdiction à vie d'exercer toute activité impliquant des contacts avec des mineurs. Pour la procureure Lorena Henry, cet homme a tout reconnu lors de l'instruction, avant de "réécrire son histoire" pour écarter les éléments pénalement répréhensibles.

La magistrate estime que le prévenu a amené les sujets de discussion dès le début et exploité l'inexpérience des deux adolescents de 16 ans, "vulnérables et curieux", pour assouvir ses pulsions. Profitant de son statut de mentor, il les a "véritablement endoctrinés en leur intimant de s'affranchir des limites."

Perte de contrôle

Les victimes ont subi des pressions psychiques. Elles n'étaient pas non plus aptes à s'opposer aux actes sexuels sous l'effet combiné de l'alcool, des stupéfiants et des médicaments. "Elles ont perdu la tête et le contrôle de leur corps, qui était constamment excité par la prise de MDMA, la drogue de l'amour", a souligné la procureure.

Concernant la longue relation avec un des plaignants, la procureure a parlé de "chemsex": "Le prévenu s'est comporté en dealer. Une addiction s'est installée chez son protégé, qui est constamment revenu se fournir gratuitement chez lui." "Sa faute est d'une extrême gravité. Il a mis en danger le développement des victimes", a-t-elle déclaré.

Un adulte "cool"

Pour la défense, le prévenu a profité de la fragilité émotionnelle des plaignants qui vivaient tous les deux des situations familiales difficiles. "Comment un professeur ne comprend-il pas qu'il est dans une relation de pouvoir avec un élève?" a lancé Anouchka Dubey. A ses yeux, le prévenu a profité de son statut d'adulte et de leur inexpérience.

Un avis partagé par Alice Aebischer, avocate de l'autre jeune. Selon elle, les deux adolescents se sentaient "privilégiés, supérieurs à leurs amis" en raison de cette relation avec un adulte "cool". "Le prévenu a observé la dérive de mon client dans le sexe et la drogue sans rien faire", a-t-elle dénoncé. Le verdict sera rendu vendredi.