Genève

Un ancien bastion du XVIIIe siècle sort de l’ombre par hasard

27.09.2023 15h09 Delphine Palma

remparts

C’est un épais mur de 19 mètres de long et 5 m de haut. Et pourtant il était passé inaperçu jusqu’à aujourd’hui. Un imposant morceau de rempart du XVIIIe siècle vient d’être découvert par hasard dans une cave du boulevard helvétique. Sa découverte est d’autant plus intéressante qu’on croyait cette fortification disparue. 

C’est en ouvrant ces caves situées sous la promenade du Pin, que la surprise s’est dévoilée. «Voici le mur du Bastion du Pin construit entre 1720 et 1722 détaille Matthieu de la Corbière. Il est extrêmement bien conservé. C’est assez étonnant à Genève de voir une structure pareille», poursuit le directeur de l’Inventaire des Monuments d’art et d’histoire du canton de Genève.

«Découverte exceptionnelle pour Genève»

Dans cette cave à vin abandonnée, les historiens sont tombés au mois d’août sur un morceau de la gigantesque enceinte qui entourait Genève au XVIIIe siècle. «Ce mur est une découverte exceptionnelle pour Genève, car nous avons très peu d’éléments de fortification du XVIIIe siècle visibles aujourd’hui, poursuit l’historien. On voit que le mur est incliné, la muraille doit résister à des tirs de canon. On voit aussi sa structure extrêmement puissante  puisque le mur est renforcé par des traverses en molasses qui consolident la muraille dans l’épaisseur.»

La quête du Graal

Genève a construit à travers son histoire, cinq enceintes successives pour protéger la Cité. Celle du XVIIIe siècle est la dernière et de loin la plus monumentale avec ses 5 km linéaires de mur. Mais la plus insaisissable aussi. Pour construire la ville moderne au XIXe siècle, les remparts ont été détruits, nivelés ou réutilisés dans de nouvelles structures. 

Les historiens cherchent à mettre la main sur les quelques vestiges encore debout. «C’est comme la quête du Graal. On les cherche depuis 20 ans environ», sourit Matthieu de la Corbière. On sait qu’il existe des vestiges mais ils sont difficiles à retrouver car ils sont noyés dans le tissu urbain.»

Un bastion au parc des Bastions

Aujourd’hui, les historiens ont mis à jour moins d’une dizaine de vestiges appartenant à ce dernier rempart. Mais en plus du Bastion du Pin, ils sont tombés en 2022, sur une partie de la fortification située au Parc des Bastions. «Ici on a trouvé la partie supérieure. On voit comment elle était traitée: avec un léger arrondi pour permettre à l’eau de s’évacuer», explique Roberta Zaccara, architecte conservatrice au service des monuments et sites. «L’intérêt de le laisser visible permet de retrouver le contact direct avec l’ouvrage, sa massivité et ses techniques constructives.»  

Avec ce bastion à ciel ouvert, dont le tracé se dessine sur le sol, le parc de la place neuve n’aura jamais aussi bien porté son nom. Ce morceau de fortification est le seul vestige de l’enceinte du XVIIIe siècle visible dans l’espace public.